L’ouverture financière de l’Éthiopie

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Restreinte durant un demi-siècle, la propriété immobilière pourrait être réformée dans le cadre des plans du gouvernement visant à ouvrir l’économie. Une des réformes saluées par le FMI.

En mai 2025, le Conseil des ministres éthiopien a adopté un projet de loi abrogeant l’interdiction de longue date faite aux ressortissants étrangers ou aux entreprises étrangères de posséder des « biens immobiliers », une mesure importante vers l’établissement de droits de propriété solides qui, selon les responsables, devrait permettre d’attirer davantage d’investissements directs étrangers.

Depuis la révolution communiste de 1974, les particuliers et les entreprises non éthiopiens n’ont pas le droit de posséder des biens immobiliers, que ce soit à des fins personnelles ou commerciales. Depuis lors, les droits de propriété sont une question politique sensible en Éthiopie, de nombreux électeurs considérant que la souveraineté nationale est liée à la propriété foncière.

Néanmoins, depuis l’élection du Premier ministre Abiy Ahmed en 2018, le gouvernement éthiopien a pris toute une série de mesures visant à ouvrir l’économie aux investissements étrangers et à promouvoir une croissance plus forte. À présent, sous réserve de l’approbation du Parlement, la réforme foncière et immobilière sera la dernière mesure de libéralisation en date.

Cette législation, si elle était adoptée, contribuerait à stimuler les investissements étrangers, à accroître le développement de logements abordables et à créer davantage d’emplois pour les Éthiopiens dans l’immobilier et les secteurs connexes.

Du moins en théorie, l’augmentation des entrées de capitaux résultant de l’ouverture de secteurs tels que l’immobilier contribuerait également à améliorer l’accès de l’Éthiopie aux devises fortes, ce qui renforcerait ses réserves de change et stabiliserait sa monnaie.

Cette initiative fait écho à plusieurs autres réformes entreprises par le gouvernement éthiopien ces dernières années. Le gouvernement a autorisé les entreprises étrangères à entrer en concurrence dans des secteurs stratégiques auparavant dominés par l’État, tels que la banque et les télécommunications, et a indiqué qu’il ouvrirait bientôt le secteur de la vente au détail en Éthiopie. Le lancement récent de la Bourse éthiopienne et la mise en circulation du birr éthiopien sont considérés comme des étapes supplémentaires dans cette direction.

La réforme prendra du temps

Mirkarim Yakubov, gestionnaire d’actifs basé à Addis-Abeba, explique à African Business qu’il faudra du temps pour que la législation soit finalisée et que les investisseurs étrangers comprennent ce que les nouvelles lois signifient dans la pratique, ce qui signifie qu’il est peu probable que l’Éthiopie connaisse une augmentation immédiate des flux de capitaux étrangers.

L’« impact dépendra de ce que cette loi impliquera exactement et de la manière dont elle sera mise en œuvre, même s’il s’agit sans aucun doute d’une mesure très intéressante », juge-t-il.

« Même si le processus d’adoption des dispositions législatives essentielles a récemment été accéléré, il faudra du temps au gouvernement pour régler les détails. Les investisseurs étrangers devront savoir s’ils seront autorisés à acquérir des biens immobiliers, résidentiels ou commerciaux, et dans quelles zones. La transparence concernant la fixation des prix des terrains et des biens immobiliers sera également un élément crucial. »

Le gestionnaire est optimiste et estime que cette mesure constitue une nouvelle étape vers « l’ouverture » que M. Abiy poursuit depuis 2018, en partie en raison des exigences du FMI (Fonds monétaire international), qui soutient financièrement le pays en échange d’une libéralisation économique (lire ci-dessous).

« Le gouvernement éthiopien tente de mobiliser différents moyens pour attirer les investissements étrangers malgré les nombreux défis économiques et sécuritaires qui persistent », explique Mirkarim Yakubov.

« Cela pourrait être intéressant pour les investisseurs étrangers ou les entreprises qui souhaitent s’implanter en Éthiopie, mais nous devons bien sûr rester prudents. Tout le monde connaît les risques de bulles immobilières liés à un afflux soudain de capitaux. »

Le FMI applaudit les réformes

Le personnel du FMI et les autorités éthiopiennes sont parvenus à un accord sur les politiques économiques à mettre en œuvre pour conclure le troisième examen de l’accord de facilité élargie de crédit de 3,4 milliards de dollars, d’une durée de quatre ans. Une fois cet accord approuvé par le Conseil d’administration du FMI, l’Éthiopie aura accès à un financement d’environ 260 millions $.

Dans une note publiée le 30 mai 2025, le FMI souligne que les résultats macroéconomiques de l’Éthiopie ont dépassé les prévisions du programme, « avec des résultats meilleurs que prévu en matière d’inflation, de croissance des exportations et de réserves internationales ».

Dès lors, juge l’institution de Washington, « il reste essentiel de maintenir la dynamique des réformes afin de consolider les progrès récents, de corriger les déséquilibres macroéconomiques, de rétablir la viabilité de la dette extérieure, de jeter les bases d’une croissance forte tirée par le secteur privé et d’assurer le succès du programme de réformes mis en place par l’Éthiopie ».

En effet, les mesures prises par les autorités au cours de la première année du programme ont donné « de bons résultats ». Le passage à un régime de taux de change flexible s’est déroulé sans heurts. Les mesures visant à moderniser la politique monétaire, à mobiliser les recettes intérieures, à renforcer les filets de Sécurité sociale, à consolider les entreprises publiques et à ancrer la stabilité financière continuent de donner des « résultats encourageants ».

« Les efforts visant à mettre fin aux derniers éléments de répression financière et à développer le marché des capitaux contribueront à mobiliser l’épargne et à soutenir l’allocation efficace du capital », juge ainsi le FMI.

 

Source : African Busines

 

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