Algérie: Tebboune fait du pouvoir d’achat une ligne rouge

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En proclamant que la loi de finances 2026 ne touchera pas au pouvoir d’achat des citoyens, Abdelmadjid Tebboune cherche à afficher une posture protectrice dans un contexte économique fragile. Mais derrière l’annonce présidentielle, la réalité budgétaire de l’Algérie laisse entrevoir des contradictions profondes entre discours social et impératifs financiers.

Le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, a voulu rassurer. En présidant le Conseil des ministres consacré au projet de loi de finances 2026, il a fixé une « ligne rouge » : aucune nouvelle taxe, aucun impôt supplémentaire. Le pouvoir d’achat du citoyen doit, selon lui, être « préservé ». Ce message, au ton populiste, intervient à un moment où l’inflation continue d’éroder le revenu réel des ménages, estimée à plus de 8 % selon les dernières données du FMI, tandis que le dinar poursuit sa lente dépréciation.

Derrière la rhétorique présidentielle, la marge de manœuvre budgétaire reste étroite. L’Algérie dépend encore à près de 90 % de ses recettes d’hydrocarbures, un secteur vulnérable aux fluctuations du marché mondial. La baisse des cours du gaz enregistrée depuis le premier semestre 2025 a déjà amputé les recettes extérieures, rendant incertaine la soutenabilité des transferts sociaux promis par le gouvernement. En annonçant le maintien des subventions et des équilibres macroéconomiques, Tebboune retarde un ajustement devenu inévitable.

Le chef de l’État appelle à « un système fiscal plus efficace » sans en renforcer la base imposable. Or, le tissu économique algérien reste dominé par l’informel et les entreprises publiques en difficulté. Sans réforme structurelle, la lutte contre l’évasion fiscale risque de se limiter à un slogan. La création de richesse et la diversification économique, souvent invoquées par le président, se heurtent à un climat d’affaires incertain et à des procédures administratives dissuasives.

En refusant également le déclassement de terres agricoles pour des projets publics, Tebboune cherche à s’ériger en défenseur de la souveraineté alimentaire, un thème mobilisateur dans un contexte de pénurie et de hausse des prix des denrées. Mais cette décision, si elle préserve l’image du président, révèle aussi l’absence d’une véritable politique foncière cohérente permettant de concilier développement urbain, industriel et agricole.

La loi de finances 2026 apparaît ainsi comme un exercice d’équilibrisme politique : préserver la paix sociale à court terme tout en évitant d’affronter les réformes douloureuses que requiert une économie sous contrainte. À la veille d’une année politiquement sensible, Tebboune trace des « lignes rouges » qui ressemblent davantage à des garde-fous électoraux qu’à une stratégie économique durable.

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