Télécommunications : Alger multiplie les annonces, sans suite

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Les annonces se multiplent, mais sans réformes structurelles de gouvernance, de transparence et d’efficacité administrative, la stratégie numérique algérienne — comme d’autres grands chantiers — risque de demeurer une succession d’annonces plus qu’un véritable changement de paradigme.

À peine la 5G officiellement activée, l’Exécutif algérien s’empresse d’afficher de nouvelles priorités technologiques. Lors de sa réunion hebdomadaire, le gouvernement a mis en avant deux chantiers majeurs : une stratégie nationale du e-commerce et le recours aux télécommunications électroniques par satellites en orbite non géostationnaire. Dans son communiqué, le gouvernement affirme vouloir moderniser un secteur numérique devenu incontournable. Mais derrière cette ambition affichée, les failles structurelles du marché et les limites du modèle algérien interrogent.

La communication officielle se veut volontariste : faire du commerce électronique un « moteur de croissance » et un levier d’inclusion financière. Pourtant, le paysage numérique algérien demeure l’un des plus informels de la région. Le marché du e-commerce a certes dépassé 1,5 milliard de dollars en 2024, les paiements en ligne ont été multipliés par trois en quatre ans, et quelque 13 millions de transactions ont été enregistrées.

Toutefois, 95 % des paiements continuent de s’effectuer en espèces. Un chiffre qui résume à lui seul les contradictions du secteur : croissance rapide, mais opacité totale ; dynamisme incontestable, mais réglementation quasi inexistante ; explosion du digital, mais fiscalité absente. Le gouvernement dénonce un « souk numérique », mais c’est précisément l’absence de cadre juridique clair, de moyens de contrôle et d’interopérabilité bancaire qui nourrit cet informel « 2.0 ».

Dans ce contexte, l’exécutif mise désormais sur le déploiement des services satellitaires, présentés comme une réponse miracle à la fracture numérique. Le Premier ministre Sifi Ghrieb a évoqué les avantages des réseaux en orbite non géostationnaire, citant un modèle inspiré de Starlink : un Internet haut débit accessible sans fibre, sans pylônes, et déployable jusque dans les zones les plus enclavées du pays.

Ces technologies pourraient effectivement transformer l’accès au numérique dans un territoire immense — 2,38 millions de km², majoritairement désertique — où les infrastructures classiques peinent à suivre. Mais les annonces gouvernementales ne dissipent pas les interrogations majeures : quel opérateur ? Quel modèle économique ? Quel degré de souveraineté numérique ? Et surtout, quel calendrier réaliste pour une technologie coûteuse et complexe, alors que même la 4G reste intermittente dans de vastes régions ?

Parallèlement à ces ambitions technologiques, le gouvernement algérien affirme suivre de près plusieurs chantiers structurants : programmes ferroviaires, infrastructures hydrauliques, transfert d’eau, barrage de Boukhroufa, et réalisation d’un complexe sportif à Constantine.

Autant de projets régulièrement annoncés et réaffirmés, parfois depuis plusieurs années, mais dont l’avancement réel reste difficile à vérifier faute de rapports publics ou de données actualisées.

Le discours officiel conclut en évoquant « la nouvelle Algérie qui se dessine ». Mais pour de nombreux observateurs, le contraste persiste entre une communication gouvernementale centrée sur l’innovation et une réalité marquée par des retards d’infrastructures, une faible bancarisation, et une régulation numérique encore embryonnaire.

SOURCE : APA News/MK/Sf/-Alger (Algérie)

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