Sénégal : l’intégration monétaire au cœur de la réunion des banques centrales africaines

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Réunis à Dakar ce 20 mai 2025, les membres du Bureau de l’Association des Banques Centrales Africaines (ABCA) examinent les avancées vers l’objectif ambitieux d’une monnaie unique continentale, tout en élaborant des stratégies communes pour renforcer la résilience économique et financière de l’Afrique, cela dans un contexte international instable marqué par des tensions géopolitiques croissantes, une volatilité des marchés financiers et des défis climatiques persistants.

Le Bureau de l’Association des Banques Centrales Africaines (ABCA) s’est réuni ce mardi au siège de la Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) à Dakar, au Sénégal. La rencontre, présidée par Dr. Rama Krishna SITHANEN, Gouverneur de la Banque de Maurice et actuel président de l’ABCA, rassemble des gouverneurs de banques centrales de tout le continent pour discuter des questions monétaires et financières cruciales affectant le continent.

L’ordre du jour du Bureau se concentre principalement sur l’évaluation de la mise en œuvre des décisions prises lors de la 46e Réunion Ordinaire du Conseil des Gouverneurs de l’ABCA tenue le 4 septembre 2024 à Port-Louis, à l’Île Maurice.

Les points clés comprennent plusieurs aspects relatifs à l’intégration monétaire africaine. Parmi ceux-ci figurent le projet de Statuts de l’Institut Monétaire Africain (IMA), le rapport du Groupe de Projet sur l’intégration des systèmes de paiement, ainsi que le rapport d’étape portant sur la mise en œuvre du Programme de Coopération Monétaire en Afrique (PCMA) pour l’année 2024.

Un document visant à améliorer la compréhension des critères du PCMA a également été présenté, contribuant à une meilleure appropriation du programme par les parties prenantes.

Par ailleurs, plusieurs initiatives institutionnelles ont été mises en avant. Il s’agit notamment du cadre pour la création des Groupes de Travail au sein de l’Association des Banques Centrales Africaines (ABCA), des activités de la Communauté des Superviseurs Bancaires Africains (CSBA), ainsi que des actions menées par le Comité Africain de Stabilité Financière (CASF).

Des questions d’ordre institutionnel, administratif et financier ont également été abordées, soulignant la complexité et l’ampleur des efforts en cours pour renforcer la coopération monétaire sur le continent.

Une réunion dans un contexte de troubles géopolitiques

Dans son discours de bienvenue, M. Jean-Claude Kassi Brou, Gouverneur de la BCEAO et président de la Sous-région Afrique de l’Ouest, a exprimé sa gratitude aux participants pour leur engagement continu à bâtir « un système monétaire africain intégré, stable, résilient et porteur d’opportunités. »

Félicitant Dr. Sithanen pour son élection à la présidence de l’ABCA, le Gouverneur BROU a souligné que la réunion se déroule « dans un contexte international marqué par des incertitudes liées à une montée des tensions commerciales et géopolitiques, une vulnérabilité accrue face aux chocs climatiques et une pression croissante sur la soutenabilité de la dette de nos États. »

Concernant la zone UEMOA, il a rapporté des performances économiques solides avec une croissance économique ressortie à 6,3 % en 2024, grâce à une demande intérieure robuste et une hausse de la production extractive, tandis que l’inflation s’est également repliée à 3,5 %. Il a projeté des tendances positives continues pour 2025, avec une croissance attendue à 6,4 % et l’inflation devrait se maintenir dans la zone cible de 1 à 3 %.

Dr. Patrick Ndzana Olomo, Directeur par intérim du Développement Économique, de l’Intégration et du Commerce à la Commission de l’Union Africaine, a souligné que la réunion se tient « à un moment critique pour notre continent, qui exige une vision stratégique, des réponses politiques robustes et une collaboration sans faille entre les principales autorités monétaires d’Afrique. »

Il a mis en évidence l’environnement économique mondial difficile, notant « des conditions financières mondiales plus strictes, des coûts d’emprunt accrus, des prix des matières premières volatils affectant à la fois les exportateurs et les importateurs, et des pressions sur les devises. »

Ces facteurs, a-t-il expliqué, « limitent notre espace fiscal et exacerbent les vulnérabilités de la dette » à travers le continent.

Dr. Olomo a souligné les progrès récents dans l’intégration monétaire africaine, particulièrement l’approbation du projet de Statuts de l’Institut Monétaire Africain (IMA) et du Mécanisme Africain de Stabilité Financière (MASF), qui représente « une étape cruciale dans la mise en place des fondements institutionnels pour l’intégration monétaire. »

Il a appelé les gouverneurs des banques centrales à « poursuivre avec une détermination inébranlable leur quête de stabilité macroéconomique », tout en se concentrant sur « le renforcement des capacités de données et d’analyse pour des politiques fondées sur des preuves; le développement de marchés de capitaux domestiques profonds pour réduire la dépendance aux emprunts extérieurs; la promotion de l’inclusion financière et de la finance numérique; et l’intégration des risques financiers liés au climat dans les cadres. »

Avancement des systèmes de paiement continentaux

Le Bureau va examiner les progrès de l’initiative d’intégration des systèmes de paiement, qui vise à faciliter le commerce intra-continental et l’intégration économique. Selon les documents de la réunion, cette initiative cherche à augmenter significativement le niveau des exportations intra-africaines, qui selon l’Agenda 2063 de l’Union Africaine, devrait passer de 12 % en 2013 à 50 % d’ici à 2045.

Suite à l’adoption des critères de sélection pour la Banque Centrale hôte de l’infrastructure des marchés financiers d’importance systémique en septembre 2024, le Groupe de Projet a travaillé à opérationnaliser ces critères et à accélérer les progrès sur l’intégration des paiements mobiles à travers le continent.

Par ailleurs, le Bureau va prendre note de la version des Statuts de l’IMA approuvée lors de la réunion ministérielle du Comité Technique Spécialisé de l’Union Africaine tenue le 30 novembre 2024 à Abuja, au Nigeria. L’IMA est un organe transitoire chargé de préparer la mise en place de la Banque Centrale Africaine (BCA) et sera basé à Abuja, au Nigeria.

Les missions de l’IMA se concentrent sur la réalisation des travaux techniques, juridiques, institutionnels, stratégiques et statistiques nécessaires à la création de la BCA et de la monnaie unique africaine. Sa structure de gouvernance comprend un Conseil d’Administration, un Comité Technique de Convergence et un secrétariat de l’Institut.

La réunion va également discuter des activités de la Communauté des Superviseurs Bancaires Africains (CSBA), travaillant sous son programme 2023-2025. La CSBA vise à renforcer la coopération en matière de supervision bancaire sur le continent en harmonisant les cadres réglementaires, en promouvant les meilleures pratiques prudentielles et en renforçant les capacités institutionnelles des autorités de supervision.

Le Comité Africain de Stabilité Financière (CASF), établi à Port-Louis le 4 septembre 2024 sur proposition de la Banque Centrale d’Égypte, présentera son rapport d’activités et examinera l’état de mise en œuvre de son programme de travail 2025.

Enfin, le Bureau procédera à la sélection de sous-thèmes en prévision de deux événements majeurs à venir. Le premier est le Séminaire Continental, qui sera organisé par Bank Al-Maghrib du 21 au 23 juillet 2025 à Rabat, au Maroc. Ce séminaire portera sur le thème : « Cyber-risques et technologies financières innovantes : défis et mesures stratégiques ». Il visera à analyser les enjeux liés à la cybersécurité dans le secteur financier et à identifier des stratégies adaptées face à l’évolution rapide des technologies.

Le second événement est le Symposium de l’Association des Banques Centrales Africaines (ABCA), prévu pour le 11 septembre 2025 à Yaoundé, au Cameroun. Il portera sur le thème : « Changement climatique et stabilité macroéconomique : rôle des Banques Centrales ». Ce symposium permettra de débattre du rôle des banques centrales dans la gestion des impacts économiques du changement climatique, en mettant en lumière les leviers macroéconomiques et les politiques monétaires susceptibles de soutenir la résilience des économies africaines.

Les Réunions Annuelles de l’Association seront organisées par la Banque des États de l’Afrique Centrale (BEAC) et se dérouleront du 7 au 12 septembre 2025 à Yaoundé, au Cameroun.

ARD/ac/APA

Source: APANEWS

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