Les demandeurs burkinabè devront désormais se rendre à Lomé pour obtenir un visa américain, à l’exception des visas diplomatiques et officiels.
L’ambassade des États-Unis au Burkina Faso a annoncé mercredi la suspension temporaire de la délivrance de la plupart des catégories de visas, une décision qui intervient dans un contexte de redéfinition des relations bilatérales entre Washington et Ouagadougou.
Selon un communiqué daté du 8 octobre 2025, les demandeurs de visas américains devront désormais se rendre à Lomé, au Togo, où les services de délivrance de visas pour les résidents du Burkina Faso seront assurés. La mesure concerne les visas d’immigrant et de non-immigrant pour les touristes, étudiants, hommes d’affaires et visiteurs d’échange. Seules les demandes de visas diplomatiques et officiels continueront d’être traitées à Ouagadougou.
Le Département d’État justifie cette décision par sa volonté de garantir que son processus de demande de visa respecte les normes les plus strictes en matière de sécurité nationale et de sécurité publique des États-Unis.
En réaction, le Burkina Faso a annoncé jeudi appliquer la réciprocité, tout en insistant sur le maintien de l’amitié, la solidarité et la fraternité entre les peuples. Le ministre des Affaires étrangères, Jean Marie Traoré, a précisé à la télévision nationale que Washington avait proposé à Ouagadougou d’accueillir des immigrants irréguliers présents aux États-Unis, une requête à laquelle le pays a toujours opposé une fin de non-recevoir.
« Le Burkina restera une terre de dignité et non une terre de déportation« , a-t-il déclaré, tout en affirmant que les mesures de réciprocité ne compromettraient pas les relations bilatérales.
Cette tension survient quelques mois après un rapprochement diplomatique notable. Fin juillet, le président américain Donald Trump avait reçu en personne à la Maison Blanche le général Kassoum Coulibaly, nouvel ambassadeur du Burkina Faso aux États-Unis. Vêtu de sa tenue militaire, l’ancien ministre de la Défense avait remis ses lettres de créance lors d’une cérémonie jugée symbolique.
Lors de cette rencontre, M. Trump avait salué l’intérêt partagé pour la prospérité des deux nations et réaffirmé la volonté d’intensifier la coopération dans les domaines du commerce, de l’énergie, des mines et des télécommunications.
Dans sa lettre au Département d’État, Kassoum Coulibaly avait souligné la profondeur des relations bilatérales malgré la crise sécuritaire persistante, rappelant que le Burkina fait face à une crise humanitaire sans précédent due aux attaques du GSIM et de l’État islamique au Sahel.
Le diplomate avait mis en avant les avancées réalisées par la transition sous le capitaine Ibrahim Traoré, notamment dans la reconquête territoriale et le retour des déplacés internes, insistant sur un partenariat fondé sur l’égalité et la confiance mutuelle.
Cette séquence s’inscrit dans une stratégie américaine de réengagement dans la région sahélienne. Ces derniers mois, plusieurs responsables américains ont multiplié les visites, notamment à Ouagadougou, Bamako et Niamey, afin de renouer un dialogue avec les régimes de transition.
Le sous-secrétaire d’État pour l’Afrique de l’Ouest, Will Stevens, avait ainsi rencontré le ministre burkinabè des Affaires étrangères le 27 mai dernier, réaffirmant une coopération solide et respectueuse de la souveraineté.
En parallèle, les relations entre les pays du Sahel et la France continuent de se détériorer, tandis que le Burkina Faso, le Mali et le Niger renforcent leurs liens avec la Russie dans le domaine de la sécurité.
Dans ce contexte d’alliances mouvantes, les États-Unis tentent de repositionner leur influence au Sahel, misant sur un discours de respect mutuel et de souveraineté, à l’heure où la diplomatie occidentale fait face à un recul de crédibilité dans la région.
SOURCE : APA News / ac/Ouagadougou (Burkina Faso)