Sénégal : Que sait-on de l’épidémie de Fièvre de la Vallée du Rift qui a causé le décès de 8 personnes ?

Le Sénégal est confronté depuis plusieurs jours à une flambée de fièvre de la vallée du Rift (FVR), une maladie virale transmise par les moustiques et les animaux infectés.

Dans la région de Saint-Louis, à la frontière avec la Mauritanie, le bilan ne cesse de s’alourdir : 20 cas confirmés et au moins 8 décès, selon les dernières données officielles. Les autorités parlent désormais d’une situation « critique » et appellent à une mobilisation communautaire d’urgence pour contenir l’épidémie.

Dimanche, le ministre de la Santé et de l’Hygiène publique, Dr Ibrahima Sy, s’est rendu dans la capitale nord du pays pour évaluer la situation. Au sortir d’une réunion du comité régional de gestion des épidémies, il a tiré la sonnette d’alarme.

« C’est la première fois qu’on enregistre au moins neuf décès en une seule semaine. Presque tous les districts de la région sont touchés, à l’exception de Pété », a déclaré le ministre.

Cette hausse brutale de la mortalité illustre la virulence de l’épidémie et inquiète particulièrement les soignants.

 

 

Pour l’instant, les foyers de contamination se concentrent dans la vallée du fleuve Sénégal, une zone où l’élevage et les échanges transfrontaliers sont particulièrement intenses.

Qu’est-ce que la fièvre de la vallée du Rift ?

Découverte pour la première fois lors d’une enquête sur une épidémie touchant les moutons dans la Vallée du Rift, au Kenya dans les années 1930, la fièvre de la vallée du Rift est une maladie virale zoonotique, c’est-à-dire qui se transmet de l’animal à l’homme.

C’est une maladie virale aigüe qui touche les animaux domestiques et les humains.

La fièvre de la Vallée du Rift est endémique en Afrique subsaharienne. Elle constitue une menace pour la santé publique et le commerce de bétail dans les pays touchés. Les pertes imputables à cette maladie sont ainsi estimées à 250 millions USD depuis 2006 selon l’Organisation Mondiale de la Santé Animale.

La maladie se propage principalement par :

 

    • la piqûre de moustiques infectés, surtout après des périodes de fortes pluies qui favorisent leur prolifération ;

 

    • le contact direct avec des animaux infectés (bovins, ovins, caprins), notamment lors de l’abattage ou de la manipulation de viande et de sang contaminés.

 

Chez l’homme, l’infection se traduit par une fièvre brutale, des douleurs musculaires, des céphalées. Dans la majorité des cas, elle reste bénigne. Mais environ 1 à 2 % des patients développent des formes graves : hémorragies, atteintes oculaires ou neurologiques, pouvant être mortelles.

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la FVR affecte aussi directement les troupeaux, provoquant des avortements massifs et une mortalité élevée chez les jeunes animaux, ce qui en fait une menace non seulement sanitaire mais aussi économique.

Changements climatiques, environnement et émergence de maladies infectieuses

L’épidémie au Sénégal survient dans un contexte climatique particulier. Les fortes pluies de cette saison hivernale ont créé de nombreuses mares temporaires dans le nord du pays. Ces poches d’eau stagnante deviennent des gîtes de reproduction idéaux pour les moustiques, principaux vecteurs de la maladie.

Dr Ibrahima Sy, ministre sénégalais de la Santé, insiste sur cette dimension : « La spécificité de cette maladie est qu’elle se propage au gré de la divagation des ruminants, mais aussi des mares qui contiennent des vecteurs capables de transmettre le virus. »

Cette situation illustre l’un des enjeux majeurs de la santé mondiale : la relation entre changements climatiques, environnement et émergence de maladies infectieuses.

Des épidémies similaires ont déjà été observées dans la Corne de l’Afrique ou en Afrique australe, souvent après des périodes de fortes inondations.

 

 

Riposte sanitaire et communautaire

Face à la propagation rapide du virus, les autorités sénégalaises ont déclenché une série de mesures d’urgence :

 

    • renforcement de la surveillance épidémiologique dans les districts sanitaires affectés ;
    • déploiement d’équipes d’intervention rapide pour identifier et isoler les cas suspects ;
    • coordination avec les services vétérinaires pour contrôler les foyers dans les troupeaux ;
    • sensibilisation des communautés rurales sur les modes de transmission et les gestes de prévention.

 

Mais pour le ministre de la Santé, l’efficacité de la riposte dépend avant tout des populations elles-mêmes :

« C’est seulement à travers une mobilisation citoyenne et communautaire, avec l’engagement des agents de santé locaux, qu’on pourra ralentir le rythme de cette maladie. »

Des associations locales et des radios communautaires sont déjà mobilisées pour relayer des messages de prévention : dormir sous des moustiquaires imprégnées, éviter les contacts directs avec le sang ou les tissus d’animaux, signaler immédiatement tout cas suspect.

Vaccins et prévention

A ce jour, il n’existe pas de vaccin homologué pour l’homme contre la fièvre de la vallée du Rift, même si plusieurs candidats sont en cours d’essais cliniques.

Pour les animaux, certains vaccins vétérinaires sont disponibles, mais leur déploiement à grande échelle reste limité par les coûts et les contraintes logistiques.

Cette absence de solution préventive rend la prévention communautaire et la lutte anti-vectorielle cruciales. Elle rappelle également l’importance d’investir dans la recherche sur les maladies zoonotiques, qui représentent une menace croissante à l’échelle mondiale.

D’après l’OMS, les mesures à prendre contre la FVR sont :

 

    • Détruire les gîtes de ponte et de larves des moustiques
    • Prévenir la population de ne pas toucher le sang ni les animaux contaminés
    • Ne pas boire de lait cru ni manger de la viande mal cuite, qui pourraient être infectés par les animaux malades
    • Dormir à l’abri de moustiquaires

 

Une menace régionale et internationale

Le Sénégal n’est pas le seul pays concerné. La fièvre de la vallée du Rift a déjà touché plusieurs pays d’Afrique de l’Est, comme le Kenya, la Tanzanie ou l’Ouganda, et des foyers ont été signalés au Yémen et en Arabie saoudite au début des années 2000.

Pour l’OMS et l’Organisation mondiale de la santé animale (OMSA), il s’agit d’une maladie à potentiel épidémique transfrontalier. La proximité de la Mauritanie et la mobilité du bétail dans la sous-région augmentent le risque d’extension au-delà du nord du Sénégal.

La fièvre de la Vallée du Rift en quelques points :

– La fièvre de la Vallée du Rift (FVR) a été identifiée pour la première fois en 1931 au Kenya, d’après l’Organisation Mondiale de la Santé.

– Des mouches hématophages (qui se nourrissent de sang) et de nombreuses espèces de moustiques propagent le virus de la maladie, comme les Aedes.

– Chez l’homme, la transmission peut se faire par la piqûre de moustiques, par le contact avec le sang, par ingestion de viande crue ou de lait cru provenant d’animaux infectés.

– Chez les animaux, l’infection provoque de nombreux avortements et une mortalité importante parmi les jeunes.

– Une surveillance de l’infection chez les populations animales et une notification immédiate en cas de détection aident à contrôler cette maladie.

– La lutte contre les moustiques en utilisant des insecticides et en s’attaquant aux gîtes larvaires est une mesure efficace.

 

Source:news.abidjan.net

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