L’Administration Trump envisage d’expulser des migrants vers la Libye Après le Salvador ou le Panama, et alors que des discussions ont été entamées avec le Rwanda, les autorités américaines semblent avoir passé un accord avec des responsables libyens pour accueillir des déportés. Quelques jours après l’annonce par le ministre rwandais des Affaires étrangères, Olivier Nduhungirehe, de discussions avec le gouvernement américain sur un accord sur l’accueil de migrants expulsés des Etats-Unis, l’Administration du président américain Donald Trump fait savoir qu’elle pourrait aussi expulser rapidement des migrants vers la Libye. Une information confiée à l’agence de presse reuters par trois responsables américains. Deux de ces responsables ont déclaré que l’armée américaine pourrait transporter les migrants par avion vers la Libye dès ce mercredi 7 mai, tout en précisant que les plans pouvaient encore changer. On ignore le nombre de migrants qui seraient envoyés en Libye ni leur nationalité. Cette mesure compléterait les expulsions de Vénézuéliens vers le Salvador, où ils sont détenus dans une prison de haute sécurité conçue pour les gangs. La semaine dernière, le secrétaire d’État américain Marco Rubio a déclaré que les États-Unis ne se contentaient pas d’envoyer des migrants au Salvador et que Washington cherchait à élargir le nombre de pays vers lesquels expulser des personnes. “Nous travaillons avec d’autres pays pour leur dire : Nous voulons vous envoyer certains des êtres humains les plus méprisables, voulez-vous nous faire cette faveur ?”, a déclaré M. Rubio lors d’une réunion du cabinet à la Maison-Blanche mercredi dernier. Dans le Projet 2025, agenda officieux de l’Administration Trump, il est “recommandé d’aborder rapidement et agressivement le refus de certains pays de recevoir les expulsés en imposant des sanctions sévères”. Les États-Unis ont conclu un accord pécuniaire avec le Salvador pour accueillir et emprisonner les migrants vénézuéliens. L’Administration Trump a expulsé vers le Panama des centaines de personnes originaires de pays asiatiques, dont l’Iran et la Chine. Les migrants, qui ont déclaré ne pas savoir où ils allaient, ont été détenus dans un hôtel pendant plusieurs jours avant d’être emmenés dans un camp près de la jungle. Certains d’entre eux ont ensuite été libérés par les autorités panaméennes. L’objectif est de signifier aux migrants qu’ils peuvent être expulsés vers des pays où ils risquent de subir des conditions de détentions brutales et arbitraires. Un pays divisé et miné par la violence Point de transit majeur pour les migrants à destination de l’Europe, la Libye gère de nombreux centres de détention pour les réfugiés et les migrants. Un rapport d’Amnesty International, datant de 2021, fait état de “violences sexuelles contre des hommes, des femmes et des enfants”. Le Global Detention Project affirme que les migrants détenus en Libye subissent “des mauvais traitements physiques et des tortures”, du travail forcé voire de l’esclavage. Dans son rapport annuel sur les droits de l’homme, publié l’an dernier, le département d’État américain critique pourtant les “conditions de détention difficiles et dangereuses” et les “arrestations ou détentions arbitraires” en Libye. Il est déconseillé aux citoyens américains de se rendre en Libye “en raison de la criminalité, du terrorisme, des mines terrestres non explosées, des troubles civils, des enlèvements et des conflits armés”. Depuis le soulèvement de 2011 et le renversement, soutenu par l’Otan, du régime de Mouammar Kadhafi, la Libye est divisée entre factions rivales. Un gouvernement d’union nationale, basé à Tripoli, est dirigé par le Premier ministre Abdulhamid al-Dbeibah depuis 2021 dans le cadre d’un processus soutenu par l’ONU, mais la Chambre des représentants basée à Benghazi ne reconnaît plus sa légitimité. L’est du pays est contrôlé par le maréchal Khalifa Haftar. Les États-Unis n’ont pas de relations officielles avec le gouvernement de Tripoli. Mais le fils de Khalifa Haftar, Saddam, était à Washington la semaine dernière et a rencontré plusieurs représentants de l’Administration Trump. Au cours de son premier mandat, Donald Trump a entretenu des relations amicales avec Khalifa Haftar, qui contrôle la plupart des champs pétrolifères de la Libye. Le 19 avril, les juges de la Cour suprême des États-Unis ont temporairement empêché l’Administration Trump d’expulser un groupe de migrants vénézuéliens qu’elle accusait d’appartenir à des gangs. L’Administration Trump a exhorté les juges à lever ou à restreindre leur ordonnance. Read more
RDC : Le futur du Congo se dessine loin de Kinshasa A Washington, à Doha, à Lome, les négociations se poursuivent pour tenter de ramener la paix dans la région des grands lacs. L’avenir politique de Félix Tshisekedi est au centre des discussions… A Lome, la photo de famille était impressionnante ce week-end. Autour de Faure Gnassingbé, président du conseil du Togo et médiateur désigné par l’Union africaine pour la crise à l’est de la République démocratique du Congo, on pouvait voir les cinq facilitateurs désignés par les communautés des États de l’Afrique de l’Est (EAC) et de l’Afrique australe (SADC) : les ex-président(e)s Sahle-Work Zewde (Éthiopie), Catherine Samba-Panza (République centrafricaine), Olusegun Obasanjo (Nigeria), Uhuru Kenyatta (Kénya) et Mokgweetsi Masisi (Botswana). Tous ont convenu de la nécessité d’unifier les processus de Nairobi et de Luanda comme cela avait déjà été évoqué lors d’un sommet conjoint EAC-SADC du 8 février 2025. C’est la première fois que le médiateur togolais, qui a succédé à cette fonction au président angolais Joao Lourenço en février dernier, réunissait les 5 cofacilitateurs pour tenter « d’harmoniser les vues et de poser les bases d’une coordination fluide et inclusive » , comme l’a expliqué Faure Gnassingbé sur X, avant de poursuivre en saluant « le soutien affirmé des partenaires et contributeurs internationaux, notamment les États-Unis et l’ONU, dont l’engagement confirme la pertinence et la maturité de la démarche enclenchée ». Une fois de plus, l’Europe et en particulier la Belgique sont les grandes absentes de ces négociations. RDC : La fumée blanche se fait désirer entre Kinshasa et le M23 Massad Boulos, conseiller principal pour l’Afrique au Département d’État américain, a exprimé son soutien aux avancées diplomatiques. « Je viens de m’entretenir avec le Président togolais, Faure Gnassingbé, au sujet des progrès significatifs réalisés suite à la signature de la Déclaration de principes entre la RDC et le Rwanda », a-t-il indiqué à son tour sur X. Démineurs d’une crise complexe La crise dans l’est de la RDC, qui dure depuis plus de 30 ans, a déjà ébranlé bien des processus, épuisé bien des négociateurs et provoqué des millions de morts et de déplacés. La désignation par les instances régionales africaines de 5 cofacilitateurs de haut rang (tous d’anciens chefs d’État) démontre à souhait la complexité de cette crise et l’attention que veulent lui accorder ces instances. La composition de cette équipe est aussi la preuve de la détermination des dirigeants africains de travailler sur une sortie de crise qui serait acceptée par tous. On se souviendra en effet que la SADC et l’EAC ont ajouté trois facilitateurs dans ce panel au mois de mars dernier. L’ex-Premier ministre éthiopien, pressenti pour l’un des postes, a finalement été laissé sur le banc de touche, jugé trop proche de Kigali par Kinshasa. Il a été remplacé par l’ancienne présidente éthiopienne Sahle-Work Zewde, rejointe par l’ancienne présidente centrafricaine (francophone) et l’ex-président du Botswana (Afrique australe) pour permettre un meilleur équilibre entre les blocs régionaux, tout en intégrant aussi la notion de genre dans cette négociations. Le poids du Nigeria Au sein de ce groupes de « négociateurs » de haut niveau, deux personnalités se détachent par leur activisme : le Togolais Faure Gnassingbé et, peut-être surtout, le Nigérian Olusegun Obasanjo. Le premier, le benjamin, qui vient d’asseoir durablement son poids sur l’échiquier politique togolais après avoir réussi à modifier la Constitution de son pays, parcourt le continent et entend tout mettre en œuvre pour réussir ce défi qui pourrait lui accorder une solide assise sur le continent. Le Togolais a par ailleurs toujours entretenu de très très bonnes relations avec Joseph Kabila et dispose dans son premier cercle d’excellents connaisseurs de la scène et des acteurs politiques congolais. Le second, du haut de ses 88 ans, a retrouvé une nouvelle jeunesse boosté par l’arrivée de Massad Boulos au poste d’envoyé spécial de Donald Trump pour la RDC et la région des Grands lacs. Massad Boulos et sa famille sont en effet des acteurs économiques au Nigeria. Obasanjo et Boulos se connaissent. Le Nigérian, qui disposait déjà du statut d’aîné et donc de sage parmi les facilitateurs, se retrouve désormais « auréolé » par sa proximité avec l’« homme » de Washington, sans oublier son passé de négociateur entre le CNDP (précurseur du M23) et Kabila en 2009. Ces dernières semaines, Obasanjo a notamment rencontré le chef d’État sud-africain Cyril Ramaphosa et l’ancien président Thabo Mbeki, excellent connaisseur, lui aussi, de la scène politique congolaise. Il s’est ensuite rendu au Zimbabwe, où il s’est entretenu avec le président Emerson Mnangagwa mais aussi avec l’ancien président congolais Joseph Kabila, hôte régulier de ce pays. Selon plusieurs sources, le message d’Obasanjo à Kabila était limpide : « son retour au pouvoir en RDC n’est pas désiré ». L’ancien chef de l’État nigérian s’est ensuite rendu à Kinshasa et à Kigali pour des entretiens avec Félix Tshisekedi et Paul kagame. Sur le même ton, le Nigérian a expliqué à son hôte congolais qu’il était esseulé sur le continent, que son salut politique et la réussite de son second mandat passaient par la mise sur pied d’un nouveau gouvernement géré par l’opposition politique. Avant d’insister sur le fait que Washington voulait « un vrai gouvernement » entre les mains d’une «vraie opposition politique », ce qui explique aussi les entretiens qu’Obasanjo tient avec les leaders de l’opposition politique congolaise (Katumbi et Mbusa il y a dix jours à Paris, Fayulu quelques jours plus tard). « L’Arbre de l’authenticité »: le nouveau film de Sammy Baloji plonge aux racines de l’Histoire de la RDC L’ombre qatarie A côté de cet effort africain initié depuis de très longs mois, est apparue une nouvelle médiation emmenée par le Qatar, pays qui a investi tant en RDC qu’au Rwanda. Deux pays dont les chefs d’État, pourtant à couteaux tirés, ne se sont guère fait prier pour se rendre à Doha en mars dernier. Jusqu’ici, les négociations entre Kinshasa et les troupes antigouvernementales de l’AFC/M23 patinent complètement à Doha. Kinshasa n’a accepté aucun préalable posé par les rebelles, comme la levée des condamnations à mort qui pèsent sur les leaders du mouvement. Mais les Qataris n’entendent pas lâcher le processus. Ils ont mis sur pied des comités d’experts chargés d’élaborer des scénarios de sortie de crise qui devraient être sur la table au début du mois de juin. Les délais se resserrent Le mois de juin est aussi présenté comme décisif dans les négociations entre le Rwanda, Kinshasa et Washington. Un calendrier cohérent dans la mesure où la stabilité de l’est de la RDC est une condition évidente pour évoquer toute question de business dans la région. Kinshasa se fait peu loquace sur ces négociations. C’est Kigali qui a donné des premiers éléments d’un calendrier et qui a évoqué, par la bouche de son ministre des Affaires étrangères, M. Nduhungirehe, la signature d’un accord à la mi-juin… dans la foulée donc de ce qui devrait se décanter à Doha. A Washington, les accords, qui devraient être signés par les présidents Paul Kagame et Félix Tshisekedi sous l’oeil de Donald Trump, sont essentiellement économiques. Ils visent ni pus ni moins à légaliser l’exportation des minerais congolais vers un de ses pays voisins où ils pourraient être raffinés tant que la RDC n’a pas la capacité de procéder à cette action sur son territoire. Les entreprises américaines pourraient donc désormais acheter en Zambie, en Ouganda ou au Rwanda, les minerais dont ils ont besoin pour leur production. La marque à la pomme ne risquerait plus de se retrouver devant les tribunaux pour des avoir achetés des minerais du sang… Ce qui serait un solide désaveu pour Félix Tshisekedi et pour celles et ceux qui ont opté pour une politique de suivi aveugle de la gestion congolaise dans la crise des grands lacs. Read more