Des moines en prière aux nageurs en plongée, en passant par les pluies de météores et la tombe du pape François, voici 11 des images les plus marquantes et mémorables de l’année jusqu’à présent.
1. Moines en prière, Thaïlande
Une photo de moines priant sous la vaste coupole dorée du Wat Phra Dhammakaya lors de la cérémonie annuelle de Makha Bucha en février est saisissante par son éclat éthéré.
Des dizaines de milliers de moines et de fidèles, dont beaucoup sont munis de lanternes, se rassemblent pour commémorer le premier grand enseignement du Bouddha.
Son éclat irréel évoque les contours d’un manuscrit birman du XIXe siècle représentant le premier sermon du Bouddha dans le Parc des Cerfs, où des moines et des animaux se pressent autour de sa silhouette rayonnante.
Ces deux images capturent la dévotion de communautés déterminées à l’honorer et à se transformer.
2. Défilé aquatique, Venise
Des photos d’un rat géant en papier mâché, qui lançait des confettis et glissait sur le Grand Canal lors du défilé aquatique qui inaugure traditionnellement le carnaval de Venise en février, ont immortalisé la scène dans un éclat de couleurs vives.
Rodent devenu spectacle, le « Pantegana » flottant émerge de manière imaginative des égouts de la ville comme un emblème du côté comique de Venise.
Avec ses éclats de couleurs, le rat offre un contraste grotesque et brillant avec le voile lumineux élégant qui enveloppe Venise dans d’innombrables peintures, comme l’Entrée du Grand Canal, du néo-impressionniste Paul Signac, datant de 1905.
Dans les deux images, Venise se dissout dans une mosaïque de lumière pixélisée.
3. Tombe du pape François, Rome
Une photo prise en avril de la tombe du pape François à Rome — le premier enterrement d’un pontife hors du Vatican depuis plus d’un siècle —, sur laquelle une rose blanche solitaire a été déposée, s’est avérée extrêmement évocatrice.
La dalle de pierre austère semble trembler sous la faible lumière de la crypte.
La transcription de la pénombre éloquente offerte par la photo évoque l’atmosphère d’un dessin de 1798 de JMW Turner représentant la tombe du cardinal Morton dans la cathédrale de Canterbury.
Le dessin au graphite sur papier de Turner semble éclairé par une lueur intérieure de plus en plus profonde, vers laquelle nos yeux se frayent un chemin, pétale après pétale. Les deux images voient la pierre, comme la mort, comme perméable, inachevée.
4. Travailleur migrant, Chandigarh, Inde
Il y a quelque chose d’inévitablement archétypal dans cette photo prise en avril d’un travailleur migrant qui s’arrête pour boire de l’eau alors qu’il récolte du blé dans la banlieue de Chandigarh, en Inde.
La tasse et la faucille du travailleur, brandies, brillant dans la lumière dorée du grain, évoquent la figure emblématique du moissonneur solitaire dans « Le vétéran dans un nouveau champ » de Winslow Homer, datant de 1865.
Dans l’œuvre de Homer, un vétéran de l’Union brandit une faux dans une mer de blé, dans une fable sur le règlement de comptes national après la guerre de Sécession américaine.
Les deux images placent leurs protagonistes entre allégorie et travail, récoltant non seulement le grain, mais aussi la promesse durable de renouveau.
5. Main robotisée, Pékin
L’image d’une jeune femme tendant la main pour toucher l’index, qui s’ouvrait lentement, d’une énorme main robotisée a été prise lors d’une visite de presse au Monde des robots de Pékin en avril.
L’éclairage dramatique de la photo et les vêtements noirs du personnage contribuent à réduire la sensation de présence humaine à de simples éclats de chair : des avant-bras flottants et un petit profil suspendu dans l’obscurité.
À première vue, ce contact étroit pourrait évoquer « La création d’Adam » de Michel-Ange, ou peut-être, mieux encore, le dessin énigmatique de mains dessinant des mains de M. C. Escher (1948).
À l’ère de l’IA, la frontière entre le créateur et la création est de plus en plus difficile à tracer.
6. Centre de transit, Buganda
La photo d’une réfugiée congolaise assise sur une balançoire dans un centre de transit près de Buganda en mai rayonne d’une joie qui transcende les inconforts matériels dont elle est témoin : la pluie incessante, la structure en acier rouillée du terrain de jeux abandonné et le siège cassé qui pend à côté d’elle.
Cette femme, qui fait partie des plus de 70 000 personnes qui ont traversé la frontière burundaise depuis janvier, affiche un moral qui défie les circonstances difficiles.
En plaçant la photo à côté du célèbre tableau « La balançoire » (1767) de l’artiste rococo français Jean-Honoré Fragonard, elle se dépouille de la frivolité courtoise de l’œuvre célèbre, récupérant la balançoire comme un élément intemporel de joie et de paix intérieure, suspendu hors de l’espace et du temps.
7. Pluie de météores, Inverness, Californie
Une photographie capturant la pluie d’étoiles filantes des Eta Aquarides alors qu’elle traversait le ciel nocturne au-dessus d’Inverness, en Californie, à l’aube du 6 mai, était à la fois inspirante et humiliante.
Éclipsée par la lueur floue de la Voie lactée au-dessus d’elle, la lueur d’un petit village semble n’être guère plus qu’une note de bas de page scintillante dans un vaste drame cosmique.
Le contraste saisissant entre l’échelle humaine et l’échelle céleste rappelle le tableau révolutionnaire d’Adam Elsheimer, « La Fuite en Égypte » (vers 1609), célèbre pour sa précision astronomique pionnière.
Dans l’œuvre d’Elsheimer, la Sainte Famille n’occupe qu’une fraction du premier plan, tandis que le regard s’élève vers l’immense ciel nocturne. Ces deux images, séparées par plusieurs siècles, témoignent non seulement des progrès contemporains en matière d’optique, mais aussi de la pérennité de l’émerveillement.
8. Yeux recouverts d’huile, Londres
Les yeux recouverts d’une substance onctueuse et huileuse, une militante du groupe d’action directe Fossil Free London s’est postée devant les bureaux de la compagnie énergétique Shell en mai.
La vente par Shell de ses actifs pétroliers terrestres au Nigeria — une mesure qui, selon les manifestants, lui permet d’échapper à sa responsabilité dans les accidents survenus dans le delta du Niger — a déclenché la manifestation.
L’entreprise nie avoir mal agi. La pose les yeux bandés évoque le tableau symboliste « Espoir » de George Frederic Watts, datant de 1886, dans lequel une femme, les yeux couverts, est assise sur un globe terrestre trouble, jouant d’une lyre plaintive.
9. Nageuse sous-marine, Singapour
Une photo presque immersive, au niveau de l’eau, du nageur chinois Tianchen Lan, participant à un relais en eau libre lors des Championnats du monde aquatiques à Singapour le 20 juillet, fige l’athlète en plein saut alors qu’il s’élance depuis un plongeoir ultra-marin.
La convergence audacieuse des bleus (ciel, eau et plateforme) et la suspension saisissante du corps de l’athlète évoquent des aspects apparemment disparates de l’imaginaire de l’artiste conceptuel français Yves Klein : sa création en 1957 d’une teinte singulièrement intense, le Bleu Klein International, et son photomontage de 1960 « Saut dans le vide ».
Ce dernier crée l’illusion de son corps tombant dangereusement d’un toit parisien dans la rue, comme la photo de Singapour, présentant le corps et le vide comme un tout.
10. Élèves de ballet, Tembisa, Afrique du Sud
Une photo prise en juillet dernier devant une académie de danse à Tembisa, en Afrique du Sud, montrant deux élèves de ballet âgées de 5 ans, Philasande Ngcobo et Yamihle Gwababa, est à la fois saisissante et émouvante.
Le contraste marqué entre le sol desséché, l’ombre ciselée et les robes délicates évoque les angles esthétiques rigoureux des innombrables scènes de Degas représentant des danseuses en train de répéter.
Fixant son regard sur la gravité gestuelle de ses danseuses, Degas abstrayait souvent les études de danse en bandes de couleur blanche, conférant à ses peintures, comme à la photo prise dans la banlieue de Johannesburg, une dimension intemporelle.
11. Enfant souffrant de malnutrition, ville de Gaza
Une série d’images bouleversantes montrant des enfants émaciés, bercés dans les bras de leur mère à Gaza en juillet, a choqué le monde entier.
Selon des experts soutenus par l’ONU, le pire scénario possible, une famine, est actuellement en train de se produire à Gaza.
Si l’histoire de l’art regorge d’images de mères réconfortant leurs enfants affligés, de « L’enfant malade » (1665) de l’artiste néerlandais Gabriël Metsu aux « Déshérités » (1903) de Pablo Picasso, les photos prises à Gaza n’ont pas d’équivalent dans la peinture ou la sculpture.
Aucune invention visuelle de la souffrance ou de la compassion, réalisée par aucun artiste, aussi talentueux ou vénéré soit-il, ne peut rendre compte de manière adéquate de l’ampleur de la détresse insondable qui se reflète dans ces photos récentes.
*Ceci est une adaptation d’un article publié à l’origine en anglais par BBC Culture. Pour accéder au texte original, cliquez ici.
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Source:news.abidjan.net