La Tunisie interdit les CDD et contrats de sous-traitance

Le Parlement tunisien interdit les contrats à durée déterminée et la sous-traitance, une réforme controversée portée par le président Saied.

L’Assemblée des représentants du peuple tunisienne a adopté mercredi une réforme majeure du Code du travail, interdisant les contrats à durée déterminée (CDD) ainsi que les contrats de sous-traitance, dans une démarche présentée par le président Kaïs Saied comme un rempart contre la précarité, mais qui suscite déjà l’inquiétude des milieux économiques.

Le texte a été approuvé par 121 députés sur les 151 que compte le Parlement tunisien, sans aucun vote contre et avec seulement quatre abstentions. Il prévoit l’obligation pour les employeurs de convertir les CDD en contrats à durée indéterminée (CDI), avec une période d’essai de six mois, renouvelable une seule fois. En cas d’infraction, les contrevenants s’exposent à des amendes allant jusqu’à 10n000 dinars (environ 3 000 euros) et à des peines d’emprisonnement pouvant atteindre six mois.

S’exprimant à l’issue du vote, le président de l’Assemblée, Brahim Bouderbala, a salué une loi qui « garantit la dignité humaine et le droit de tout citoyen à travailler dans des conditions décentes ».

La nouvelle législation, qui devrait entrer en vigueur dans les prochaines semaines, prévoit néanmoins certaines exceptions : les CDD resteront autorisés pour les emplois saisonniers ou en cas de remplacement temporaire, sans précision sur les secteurs concernés.

Dans les faits, cette réforme pourrait profondément bouleverser le tissu économique tunisien. Les CDD sont en effet largement utilisés dans le secteur des services – qui représente près de la moitié des emplois du pays – tandis que la sous-traitance est omniprésente dans l’industrie manufacturière, notamment dans les filières de l’automobile, de l’aéronautique et du textile, où opèrent de nombreux fournisseurs de groupes étrangers. Désormais, les salariés affectés à des missions de gardiennage, de nettoyage ou de jardinage devront être employés en CDI par les sociétés prestataires.

Cette décision intervient alors que l’économie tunisienne, malgré un léger rebond post-Covid, reste confrontée à de lourdes difficultés : un chômage endémique (16% au niveau national, près de 40% chez les jeunes), une inflation persistante et une croissance atone. En 2024, le PIB a progressé de seulement 1,4% après 0,4% en 2023, grâce aux recettes issues du tourisme et de l’huile d’olive. La Banque mondiale a récemment abaissé sa prévision de croissance pour 2025 à 1,9%, contre 2,2% auparavant.

De nombreux analystes s’interrogent désormais quant à l’impact de cette réforme sur l’attractivité du marché du travail et sur la compétitivité des entreprises tunisiennes, alors que le pays tente de relancer les négociations avec ses bailleurs de fonds, en particulier le FMI.

MK/ac/Sf/APA

Source: APANEWS

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