La mine du fer de Gara Djebilet

L’exploitation d’un important gisement de fer permettrait l’économie d’intrants, une hausse des exportations et une meilleure intégration de l’économie algérienne.

 

La nouvelle loi minière entend encourager les investissements étrangers dans le cadre d’une politique stable et durable. Outre l’annulation de la règle des 51 % /49 % dans la répartition du capital, le texte facilite les procédures afin de mettre fin aux obstacles bureaucratiques et diminuer la durée de traitement des demandes d’obtention des titres miniers.

Des mesures permettent de promouvoir le partenariat dans toutes ses formes avec les sociétés privées nationales et étrangères pour garantir les financements, les activités et les transferts de technologie. L’octroi du permis minier est accordé pour une durée maximale de trente ans avec possibilité de renouvellement à plusieurs reprises autant que le permettent les réserves à exploiter. La durée du permis d’exploitation des carrières a été limitée à une durée maximale de 15 ans avec possibilité de renouvellement.

La loi minière ne brade pas le patrimoine national. Ce projet tient compte de la forte concurrence internationale pour attirer les investisseurs et il peut contribuer à réduire les importations de produits sidérurgiques.

Le permis d’exploitation artisanale des mines et des carrières est accordé par l’Agence nationale des activités minières pour une durée maximale de cinq ans avec possibilité de renouvellement plusieurs fois consécutives et pour la même durée. Les titres et licences minières délivrés ne confèrent pas à leur titulaire un droit de propriété sur le sol ou le sous-sol.

L’exploitation implique de poser l’importance de l’énergie et de l’eau. Les effets sur la qualité de l’eau et de la disponibilité des ressources en eau dans la zone du projet constituent peut-être l’impact le plus important d’un projet d’exploitation minière. Les questions clés sont de savoir si les fournitures en eau de surface et en eaux souterraines resteront appropriées à la consommation humaine, et si la qualité des eaux de surface dans la zone du projet restera adéquate pour supporter la vie aquatique et la faune terrestre native.

Les besoins énergétiques de l’activité minière sont largement dépendants du type de mine d’où sont extraites les matières premières recherchées. Ils sont beaucoup plus importants dans le cas de l’activité minière souterraine du fait des opérations de transports des matériaux vers la surface, du pompage des eaux, de la ventilation, de la climatisation des galeries.

 

La question de l’eau

La mine de fer de Gara Djebilet – avec des réserves estimées à 3,5 milliards de tonnes, dont 1,7 milliard de tonnes sont exploitables – est composée de trois zones d’exploitation : Gara Djebilet-Ouest, Gara Djebilet-Centre et Gara Djebilet-Est. Ce gisement est classé deuxième au niveau mondial en termes de réserves, derrière l’Australie 5,1 milliards de tonnes et avant Brésil 3,4 milliards de tonnes, la Russie 2,9 milliards de tonnes et la Chine 2 milliards de tonnes.

L’exploitation de ce gisement permettrait, selon le ministère de l’Énergie et des mines, d’économiser deux milliards de dollars en intrants, d’exporter et de favoriser l’intégration de l’économie algérienne. Cela suppose un partenariat gagnant-gagnant et de descendre à l’aval de la filière pour la production de produits à forte valeur ajoutée.

La découverte du gisement de Gara Djebilet date des années 1950 avec les études du Bureau de recherche minière en Algérie en 1953, le Bureau d’investissement en Afrique en 1959, le Service d’études et recherches minières en 1961 jusqu’aux premières tentatives de développement à titre expérimental du site avec l’entrée en scène de la Sonarem après la nationalisation des mines. Cet effort d’expérimentation a été stoppé net en 1975.

Les avis d’appel internationaux à manifestation d’intérêt lancés par Sonatrach, détenteur depuis 2009 du titre minier (adjudication, exploration) n’ont pas connu le succès escompté. Resté au stade de la préfaisabilité, le dernier « projet de Gara Djebilet », mis sur pied en 2005, intégrait la construction d’une cité minière près du site appelé à accueillir une importante main-d’œuvre, l’extraction du minerai de fer avec option pour son enrichissement sur place, son transport par voie ferroviaire vers le nord du pays, et enfin l’ouverture d’une usine sidérurgique proche d’un port.

Le lancement du projet est tributaire de la disponibilité de quantités suffisantes d’eau dans la région. Les infrastructures ferroviaires et énergétiques dont la réalisation de la ligne reliant Béchar à Tindouf (950 km) sont destinées à acheminer le minerai de fer vers les sites de transformation et d’exploitation. Le président de la République a procédé à la pose de la première pierre du projet d’usine de traitement du minerai de fer le 1er décembre 2023. Ce projet constitue l’un des plus importants projets structurants sur lesquels mise l’Algérie pour impulser une nouvelle dynamique à son économie, tout en générant de 15 000 à 20 000 emplois.

 

De nouveaux investissements

Le prix de l’acier fluctue entre 750 et plus de 1000 $ la tonne et le prix du fer brut s’établit à environ 100 $ la tonne. Ce qui montre l’importance de la transformation pour avoir une forte valeur ajoutée même si cela nécessite d’importants investissements en aval.

L’exploitation du mégaprojet de Gara Djebilet se fera par l’Enterprise nationale publique FERAAL, et un consortium chinois composé de trois entreprises, à savoir MCC , CWE, et HEYDAY SOLAR. L’exploitation se déroule en plusieurs phases sur une période allant de 2022 à 2040.

La première phase (2022-2025) prévoit une production de 2 à 3 millions tonnes/an de minerais de fer à acheminer par voie terrestre vers la wilaya de Béchar, pour arriver, à partir de 2026, à une production annuelle oscillant entre 40 et 50 millions de tonnes.

Dans le cadre de l’approche intégrée pour l’exploitation du gisement, ce dernier sera renforcé en 2026 par un complexe sidérurgique dans la wilaya de Bechar, via un investissement d’un milliard $. Ce complexe industriel sera spécialisé dans la production des rails et des profilés en acier.

Cette usine compte également plusieurs unités de traitement et de transformation du fer, de fabrication de wagons pour le transport du minerai de fer de Gara-Djebilet vers Bechar et le complexe sidérurgique de Bethioua (Oran).

Le 9 mai 2022, le ministre des Mines a annoncé que la réalisation du projet de Gara Djebilet nécessitera la réalisation de plusieurs installations, ayant un coût variant entre 1 et 1,5 milliard $ par an sur une période de 8 à 10 ans.

On le voit, la loi minière ne brade pas le patrimoine national. Ce projet tient compte de la forte concurrence internationale pour attirer les investisseurs. Il peut contribuer à réduire les importations de produits sidérurgiques évalués à environ 1,5 à 2 milliards $ par an, à améliorer l’intégration de l’économie nationale : substitution à l’importation, dynamiser les exportations hors hydrocarbures et donc permettre des entrées en devises.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Abderrahmane Mebtoul est professeur des universités

@AB

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