Browsing category

Afrique

A bout de force, des migrants africains errent dans le désert entre Tunisie et Libye Marchant jusqu’à l’épuisement, des migrants d’Afrique subsaharienne arrivent quotidiennement par centaines en Libye, après avoir été abandonnés à la frontière, en plein désert, par les forces de sécurité tunisiennes, selon leurs témoignages et ceux de gardes-frontières libyens recueillis par l’AFP. Une centaine d’Africains ont été secourus dimanche par des gardes libyens alors qu’ils erraient dans une zone aride inhabitée près du Sebkhat al-Magta, un lac salé, le long de la frontière tuniso-libyenne, a constaté une équipe de l’AFP. Il est midi, l’heure où la chaleur est insoutenable par plus de 40 degrés, une patrouille retrouve un homme évanoui et tente de le ranimer en versant quelques gouttes d’eau sur ses lèvres. Il respire à peine. Au loin, dans la brume de chaleur, on distingue six points noirs. Quelques minutes plus tard, ces rescapés expliquent en arabe qu’ils viennent de Tunisie. Depuis environ deux semaines, les gardes-frontières libyens disent avoir secouru des centaines de migrants, déposés, selon eux, par les autorités tunisiennes à la frontière, à la hauteur de la localité d’Al’Assah, à 150 kilomètres au sud-ouest de Tripoli. A la suite d’affrontements entre migrants et habitants ayant coûté la vie à un Tunisien le 3 juillet, des centaines d’Africains ont été chassés de Sfax, principal point de départ en Tunisie pour l’émigration clandestine vers l’Europe. Un migrant africain tente de se rafraîchir à son arrivée à la frontière entre la Libye et la Tunisie, près d’Al’Assah, le 30 juillet 2023 AFP Mahmud Turkia – Ils s’écroulent, épuisés – Selon l’ONG Human Rights Watch, au moins « 1.200 ressortissants subsahariens » ont alors été « expulsés » par les forces de sécurité tunisiennes aux frontières avec la Libye à l’est, et l’Algérie à l’ouest. Le Croissant rouge tunisien en a par la suite mis à l’abri plus de 600 à Ras Jedir, zone tampon séparant Tunisie et Libye, et environ 200 du côté algérien. Des migrants africains dans le désert, près d’Al’Assah, à la frontière entre la Libye et la Tunisie, le 30 juillet 2023 AFP Mahmud Turkia Mais près d’Al’Assah, à 40 kilomètres au sud de Ras Jedir, ils continuent d’affluer, hébétés, par grappes de deux ou trois ou par dizaines. Epuisés par la chaleur et la soif, ils s’écroulent aux pieds des gardes. Ces derniers temps, les gardes-frontières libyens, la direction de la lutte contre l’immigration saharienne et les militaires du « Bataillon 19 » effectuent des patrouilles quotidiennes. « Nous sommes à la ligne de démarcation entre Libye et Tunisie et voyons arriver de plus en plus de migrants chaque jour », déplore Ali Wali, porte-parole du Bataillon 19. Il explique avoir autorisé l’AFP à les accompagner en patrouille « pour faire taire ceux (en Tunisie, ndlr) qui prétendent que nous avons fabriqué tout cela et amené les migrants ici », à la frontière. Dans leur rayon d’action de 15 kilomètres autour d’Al’Assah, ils récupèrent « selon les jours 150, 200, 350, parfois jusqu’à 400/500 clandestins », dit-il. Aujourd’hui, ils sont 110, dont deux femmes. Deux autres signalées par un migrant n’ont pas été retrouvées. Un militaire scrute l’horizon avec ses jumelles. Les survivants ont franchi la frontière sans le savoir, marchant dans la direction indiquée par les policiers tunisiens: la Libye. Gardes-frontière libyens à la frontière avec la Tunisie, près d’Al’Assah, le 30 juillet 2023 AFP Mahmud Turkia – Deux jours de marche – Haytham Yahiya est Soudanais. Il travaillait depuis un an dans le bâtiment en Tunisie, où il était arrivé en passant clandestinement par le Niger puis l’Algérie. Un migrant africain s’effondre à son arrivée à la frontière entre la Libye et la Tunisie, près d’Al’Assah, le 30 juillet 2023 AFP Mahmud Turkia « J’étais au travail quand ils m’ont attrapé et amené ici, d’abord dans une voiture de police, puis dans un camion militaire (des forces de sécurité tunisiennes, ndlr) puis ils m’ont abandonné en me disant d’aller en Libye », dit-il. Sous un soleil de plomb, sans eau ni nourriture, certains ont « marché deux jours ». C’est le cas d’Alexander Unche Okolo, entré illégalement « en Tunisie en traversant l’Algérie ». Il a « passé un peu de temps à Tunis » avant d’être « arrêté dans la rue » récemment puis « emmené au désert du Sahara », explique ce Nigérian de 41 ans. Emu, il montre l’écran de son téléphone: « ils me l’ont cassé et m’ont frappé », accuse-t-il. Selon M. Wali, samedi, « deux corps ont été trouvés, et deux jours avant, cinq dont une femme avec son bébé, en plus de cinq autres corps retrouvés il y a une semaine ». « Comment voulez-vous qu’ils survivent à ça ? La chaleur, sans eau et une marche de deux, trois jours », dit le porte-parole. Des migrants africains à leur arrivée près d’Al’Assah, à la frontière entre la Libye et la Tunisie, le 30 juillet 2023 AFP Mahmud Turkia – Au moins 17 morts – Selon des organisations humanitaires en Libye contactées par l’AFP, le bilan est d’au moins 17 morts ces trois dernières semaines. A Ras Jedir, ils sont encore 350 dans un campement de fortune, dont 65 enfants et 12 femmes enceintes: « Leurs conditions de vie sont très problématiques », indique à l’AFP un responsable humanitaire en Libye. Selon lui, environ 180 autres migrants, dont 20 enfants, sont provisoirement hébergés à Al’Assah. A Ras Jedir, cela fait une dizaine de jours qu’ils ont commencé à recevoir de l’eau, de la nourriture et des soins médicaux du Croissant rouge libyen. Leur situation s’améliore « mais ce n’est pas soutenable dans la durée, il n’y a pas de sanitaires, ni de réservoirs d’eau, ni de véritables abris », souligne la source humanitaire. Le gouvernement de Tripoli a fait savoir ces derniers jours qu’il refusait une « réinstallation » sur son territoire des migrants arrivant de Tunisie. La Libye a été épinglée par plusieurs rapports de l’ONU dénonçant des violences à l’encontre des 600.000 migrants qu’elle détient, pour la plupart dans des camps. Des gardes-frontières libyens donnent à boire à des migrants africains à leur arrivée à la frontière entre la Libye et la Tunisie, près d’Al’Assah, le 30 juillet 2023 AFP Mahmud Turkia

Read more

RDC : Le futur du Congo se dessine loin de Kinshasa A Washington, à Doha, à Lome, les négociations se poursuivent pour tenter de ramener la paix dans la région des grands lacs. L’avenir politique de Félix Tshisekedi est au centre des discussions… A Lome, la photo de famille était impressionnante ce week-end. Autour de Faure Gnassingbé, président du conseil du Togo et médiateur désigné par l’Union africaine pour la crise à l’est de la République démocratique du Congo, on pouvait voir les cinq facilitateurs désignés par les communautés des États de l’Afrique de l’Est (EAC) et de l’Afrique australe (SADC) : les ex-président(e)s Sahle-Work Zewde (Éthiopie), Catherine Samba-Panza (République centrafricaine), Olusegun Obasanjo (Nigeria), Uhuru Kenyatta (Kénya) et Mokgweetsi Masisi (Botswana). Tous ont convenu de la nécessité d’unifier les processus de Nairobi et de Luanda comme cela avait déjà été évoqué lors d’un sommet conjoint EAC-SADC du 8 février 2025. C’est la première fois que le médiateur togolais, qui a succédé à cette fonction au président angolais Joao Lourenço en février dernier, réunissait les 5 cofacilitateurs pour tenter « d’harmoniser les vues et de poser les bases d’une coordination fluide et inclusive » , comme l’a expliqué Faure Gnassingbé sur X, avant de poursuivre en saluant « le soutien affirmé des partenaires et contributeurs internationaux, notamment les États-Unis et l’ONU, dont l’engagement confirme la pertinence et la maturité de la démarche enclenchée ». Une fois de plus, l’Europe et en particulier la Belgique sont les grandes absentes de ces négociations. RDC : La fumée blanche se fait désirer entre Kinshasa et le M23 Massad Boulos, conseiller principal pour l’Afrique au Département d’État américain, a exprimé son soutien aux avancées diplomatiques. « Je viens de m’entretenir avec le Président togolais, Faure Gnassingbé, au sujet des progrès significatifs réalisés suite à la signature de la Déclaration de principes entre la RDC et le Rwanda », a-t-il indiqué à son tour sur X. Démineurs d’une crise complexe La crise dans l’est de la RDC, qui dure depuis plus de 30 ans, a déjà ébranlé bien des processus, épuisé bien des négociateurs et provoqué des millions de morts et de déplacés. La désignation par les instances régionales africaines de 5 cofacilitateurs de haut rang (tous d’anciens chefs d’État) démontre à souhait la complexité de cette crise et l’attention que veulent lui accorder ces instances. La composition de cette équipe est aussi la preuve de la détermination des dirigeants africains de travailler sur une sortie de crise qui serait acceptée par tous. On se souviendra en effet que la SADC et l’EAC ont ajouté trois facilitateurs dans ce panel au mois de mars dernier. L’ex-Premier ministre éthiopien, pressenti pour l’un des postes, a finalement été laissé sur le banc de touche, jugé trop proche de Kigali par Kinshasa. Il a été remplacé par l’ancienne présidente éthiopienne Sahle-Work Zewde, rejointe par l’ancienne présidente centrafricaine (francophone) et l’ex-président du Botswana (Afrique australe) pour permettre un meilleur équilibre entre les blocs régionaux, tout en intégrant aussi la notion de genre dans cette négociations. Le poids du Nigeria Au sein de ce groupes de « négociateurs » de haut niveau, deux personnalités se détachent par leur activisme : le Togolais Faure Gnassingbé et, peut-être surtout, le Nigérian Olusegun Obasanjo. Le premier, le benjamin, qui vient d’asseoir durablement son poids sur l’échiquier politique togolais après avoir réussi à modifier la Constitution de son pays, parcourt le continent et entend tout mettre en œuvre pour réussir ce défi qui pourrait lui accorder une solide assise sur le continent. Le Togolais a par ailleurs toujours entretenu de très très bonnes relations avec Joseph Kabila et dispose dans son premier cercle d’excellents connaisseurs de la scène et des acteurs politiques congolais. Le second, du haut de ses 88 ans, a retrouvé une nouvelle jeunesse boosté par l’arrivée de Massad Boulos au poste d’envoyé spécial de Donald Trump pour la RDC et la région des Grands lacs. Massad Boulos et sa famille sont en effet des acteurs économiques au Nigeria. Obasanjo et Boulos se connaissent. Le Nigérian, qui disposait déjà du statut d’aîné et donc de sage parmi les facilitateurs, se retrouve désormais « auréolé » par sa proximité avec l’« homme » de Washington, sans oublier son passé de négociateur entre le CNDP (précurseur du M23) et Kabila en 2009. Ces dernières semaines, Obasanjo a notamment rencontré le chef d’État sud-africain Cyril Ramaphosa et l’ancien président Thabo Mbeki, excellent connaisseur, lui aussi, de la scène politique congolaise. Il s’est ensuite rendu au Zimbabwe, où il s’est entretenu avec le président Emerson Mnangagwa mais aussi avec l’ancien président congolais Joseph Kabila, hôte régulier de ce pays. Selon plusieurs sources, le message d’Obasanjo à Kabila était limpide : « son retour au pouvoir en RDC n’est pas désiré ». L’ancien chef de l’État nigérian s’est ensuite rendu à Kinshasa et à Kigali pour des entretiens avec Félix Tshisekedi et Paul kagame. Sur le même ton, le Nigérian a expliqué à son hôte congolais qu’il était esseulé sur le continent, que son salut politique et la réussite de son second mandat passaient par la mise sur pied d’un nouveau gouvernement géré par l’opposition politique. Avant d’insister sur le fait que Washington voulait « un vrai gouvernement » entre les mains d’une «vraie opposition politique », ce qui explique aussi les entretiens qu’Obasanjo tient avec les leaders de l’opposition politique congolaise (Katumbi et Mbusa il y a dix jours à Paris, Fayulu quelques jours plus tard). « L’Arbre de l’authenticité »: le nouveau film de Sammy Baloji plonge aux racines de l’Histoire de la RDC L’ombre qatarie A côté de cet effort africain initié depuis de très longs mois, est apparue une nouvelle médiation emmenée par le Qatar, pays qui a investi tant en RDC qu’au Rwanda. Deux pays dont les chefs d’État, pourtant à couteaux tirés, ne se sont guère fait prier pour se rendre à Doha en mars dernier. Jusqu’ici, les négociations entre Kinshasa et les troupes antigouvernementales de l’AFC/M23 patinent complètement à Doha. Kinshasa n’a accepté aucun préalable posé par les rebelles, comme la levée des condamnations à mort qui pèsent sur les leaders du mouvement. Mais les Qataris n’entendent pas lâcher le processus. Ils ont mis sur pied des comités d’experts chargés d’élaborer des scénarios de sortie de crise qui devraient être sur la table au début du mois de juin. Les délais se resserrent Le mois de juin est aussi présenté comme décisif dans les négociations entre le Rwanda, Kinshasa et Washington. Un calendrier cohérent dans la mesure où la stabilité de l’est de la RDC est une condition évidente pour évoquer toute question de business dans la région. Kinshasa se fait peu loquace sur ces négociations. C’est Kigali qui a donné des premiers éléments d’un calendrier et qui a évoqué, par la bouche de son ministre des Affaires étrangères, M. Nduhungirehe, la signature d’un accord à la mi-juin… dans la foulée donc de ce qui devrait se décanter à Doha. A Washington, les accords, qui devraient être signés par les présidents Paul Kagame et Félix Tshisekedi sous l’oeil de Donald Trump, sont essentiellement économiques. Ils visent ni pus ni moins à légaliser l’exportation des minerais congolais vers un de ses pays voisins où ils pourraient être raffinés tant que la RDC n’a pas la capacité de procéder à cette action sur son territoire. Les entreprises américaines pourraient donc désormais acheter en Zambie, en Ouganda ou au Rwanda, les minerais dont ils ont besoin pour leur production. La marque à la pomme ne risquerait plus de se retrouver devant les tribunaux pour des avoir achetés des minerais du sang… Ce qui serait un solide désaveu pour Félix Tshisekedi et pour celles et ceux qui ont opté pour une politique de suivi aveugle de la gestion congolaise dans la crise des grands lacs.

Read more