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Soko WAZA

Le photographe et créateur visuel arpente la forêt congolaise, dont l’histoire embrasse le destin du pays. Il convoque aussi la mémoire de deux hommes, intimement liés aux recherches sur les richesses naturelles de la RDC, dont l’ingénieur Paul Panda Farnana. (Vidéo ci-dessous) Quels liens existent-ils entre Paul Panda Farnana, tout premier « fonctionnaire colonial belge à la peau noire » et Abiron Beirnaert, premier directeur de la division huile de palme de l’institut national d’étude agronomique du Congo Belge ? Tous les deux étaient des ingénieurs agronomes, formés en Belgique, et tous les deux ont poursuivi des recherches poussées sur la flore du Bassin du Congo. C’est d’ailleurs cette partie de leur activité qui les relie, à travers les siècles, au biologiste Koen Hufkens de l’université de Gand. En 2013, ce dernier découvre que des observations et notes extrêmement précieuses, prises entre 1937 et 1958, sur quelque 2000 arbres ont fait de Yangambi un institut de pointe dans le domaine de la recherche agricole et forestière en Afrique. L’étude de ces carnets oubliés du Congo pourrait montrer comment les arbres réagissent au changement climatique. Deuxième réservoir vert le plus important, après celui d’Amazonie, la forêt congolaise joue un rôle crucial dans le contrôle du réchauffement climatique en absorbant des millions de tonnes de CO2. Sammy Baloji plonge au coeur de la forêt au Congo et exhume les traces d’une exploitation des richesses naturelles qui menace notre humanité tout entière. Le film souligne ces vérités essentielles, mais va aussi bien au-delà. En renouant les fils de l’histoire du centre Yangambi, haut lieu du savoir et de la recherche humaine, il retrace la chronologie brutale, accidentée et souvent controversée de l’exploitation forestière qui se mêle inextricablement au destin politique du Congo, à travers la colonisation, les guerres, l’indépendance mais aussi l’exploitation toujours plus féroce des richesses de son sol et son sous-sol. De la même façon que l’exploitation de l’homme par l’homme a renforcé le racisme, la violence et le chaos, l’exploitation à outrance de la nature nous conduira à notre perte. Retraçant le travail de ces témoins d’exception, à travers leurs carnets de notes et leurs discours, le réalisateur Sammy Baloji met en lumière la façon dont ces dérives se sont installées dès le début du XXe siècle au Congo. Tout était en germe dès les premiers temps de la colonisation qui, sous couvert d’exploitation des richesses « pour le bien du plus grand nombre », a institué le « vandalisme rationalisé », comme le dénonce si bien Paul Panda Farnana.

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