L’Algérie annonce un projet de loi sur la protection des données personnelles, censé rapprocher le pays des standards européens. Si cette initiative est saluée dans le cadre d’une future coopération avec Eurojust, elle soulève de nombreuses interrogations quant à ses motivations profondes et son degré d’indépendance.
Présenté cette semaine comme une avancée juridique majeure, le nouveau projet de loi algérien sur la protection des données personnelles vise explicitement à « faciliter les échanges avec les institutions judiciaires européennes, notamment Eurojust », selon les termes du ministère de la Justice. Une formulation qui illustre à elle seule la nature extrinsèque de la réforme : davantage impulsée par la pression diplomatique que par une demande sociale ou une logique de protection des libertés.
Dans un pays où les dispositifs de surveillance sont massifs, où la cybersécurité relève du domaine militaire, et où les lois antiterroristes permettent des interceptions de communications sans réel contrôle judiciaire indépendant, l’annonce d’un texte garantissant « le respect de la vie privée des citoyens » surprend. Plusieurs ONG algériennes et internationales, dont Amnesty International, ont déjà exprimé leurs réserves sur l’absence de consultation des acteurs de la société civile dans l’élaboration du projet.
Le texte reste pour l’instant confidentiel, mais selon les premières fuites relayées par El Watan, l’organe chargé de faire appliquer cette loi ne disposerait ni de pouvoir de sanction autonome, ni de statut réellement indépendant. L’infrastructure technologique nationale étant entièrement centralisée sous l’autorité du ministère de l’Intérieur, les marges de manœuvre d’une « autorité de protection » seraient réduites à un rôle consultatif.
Enfin, cette réforme intervient dans un contexte marqué par une montée en puissance de la surveillance numérique des opposants et des journalistes, y compris via des outils technologiques importés. Sans clarification ni débat parlementaire ouvert, le risque est grand que cette loi ne serve qu’à légitimer des accords bilatéraux avec l’Europe, tout en maintenant intact l’arsenal répressif en vigueur à l’intérieur.
SOURCE:APANews/APA-Alger (Algérie)