Algérie: l’allocation chômage, un remède partiel à la crise du pouvoir d’achat

En l’absence d’une stratégie anti-inflation, de réformes structurelles et d’une diversification économique réellement opérationnelle, les annonces sociales risquent de demeurer des réponses ponctuelles à une crise de pouvoir d’achat qui, elle, devient chronique.

La décision du président Abdelmadjid Tebboune d’augmenter le Salaire national minimum garanti (SNMG) et la prime chômage a été saluée par de nombreux acteurs politiques et syndicaux, ainsi que par des citoyens durement éprouvés par l’érosion du pouvoir d’achat. Mais si la mesure apporte un répit à court terme, plusieurs économistes soulignent qu’elle ne traite pas les causes structurelles de la crise sociale qui frappe l’Algérie, où l’inflation des produits essentiels continue de rogner les revenus des ménages.

Selon les décisions entérinées lors du dernier Conseil des ministres, le SNMG passera de 20 000 à 24 000 dinars dès janvier 2026. Une hausse de 4 000 dinars qui, pour nombre de travailleurs, relève davantage d’un ajustement minimal que d’un véritable rattrapage salarial. « L’augmentation était attendue, mais elle reste loin de refléter la réalité du panier de la ménagère », confie Omar, agent de l’EPIC Nadhif, à Bouira. Pour les employés aux revenus proches du minimum, l’effet psychologique de l’annonce est indéniable.

Mais les chiffres rappellent un paradoxe : face à une inflation qui aurait dépassé les 9 % selon plusieurs estimations officieuses, cette revalorisation équivaut à peine à compenser une partie de la perte de pouvoir d’achat accumulée depuis trois ans.

Des témoignages recueillis illustrent cette fragilité. « Je touche 35 000 DA pour une famille de cinq personnes. On parle d’une hausse historique, mais elle s’évaporera en quelques semaines », explique un salarié averti. Dans un marché où les prix de l’alimentation, du logement ou du transport continuent de grimper, les 4 000 dinars supplémentaires apparaissent comme un coussin temporaire dans une économie durablement sous tension.

La prime de chômage, relevée de 15 000 à 18 000 dinars, suit la même logique. Le chef de l’État a ordonné une révision du dispositif, désormais attribué pour une durée minimale d’un an, renouvelable. L’objectif affiché : mieux encadrer un système critiqué pour ses dysfonctionnements et sa faible capacité à orienter les bénéficiaires vers l’emploi réel. Il a également insisté sur la nécessité d’une base nationale actualisée pour distinguer les chômeurs effectifs des personnes déjà insérées professionnellement, une problématique qui pèse sur la crédibilité statistique du marché du travail algérien.

Le président Tebboune a aussi mandaté le ministère du Travail pour élaborer des propositions de revalorisation des pensions et allocations de retraite, sujet hautement sensible dans un pays où une partie importante des retraités vit sous le seuil d’un revenu décent. Là encore, les questions demeurent : quelle marge budgétaire réelle pour financer des mesures sociales d’envergure ? Et surtout, ces hausses seront-elles suffisantes pour enrayer l’appauvrissement progressif de millions de ménages ?

Si la communication officielle insiste sur « la plus importante hausse enregistrée depuis des décennies », la réalité économique impose une lecture plus nuancée. Jusqu’ici, les revalorisations successives s’inscrivent davantage dans une logique de rattrapage tardif que dans un projet cohérent de justice sociale.

SOURCE : APA News/MK/ak/ac/Alger (Algérie)

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