Algérie : la lutte anticorruption polarisée par l’effet d’annonces

 

Alger multiplie les annonces et les forums internationaux sur la récupération des fonds détournés. Mais malgré les centaines de requêtes adressées à l’étranger, les résultats concrets tardent à se matérialiser, révélant les limites d’un dispositif davantage tourné vers la communication que vers l’efficacité.

La Haute autorité de transparence, de prévention et de lutte contre la corruption (HAATPLC) a représenté l’Algérie à Vienne du 1er au 5 septembre aux sessions onusiennes consacrées à l’application de la Convention des Nations unies contre la corruption et au recouvrement des avoirs. Selon les autorités, plus de 335 demandes d’entraide judiciaire ont été transmises à 32 pays afin d’identifier et de geler les fonds détournés entre 2000 et 2010, période décrite comme celle des « années noires de la corruption ».

Le discours officiel insiste sur « la détermination du président Tebboune » à rapatrier des « sommes faramineuses » et met en avant l’adhésion de l’Algérie à une multitude de réseaux internationaux : Initiative StAR de la Banque mondiale, Forum mondial sur le recouvrement d’avoirs (GFAR), Globe Network ou encore ARIN-MENA. L’exécutif algérien présente ces adhésions comme autant de gages de sérieux et de crédibilité.

Pourtant, derrière cette surenchère diplomatique, les résultats restent minces. Peu de montants détournés ont effectivement été restitués, malgré les promesses de coopération de pays comme la Suisse. La multiplication des annonces contraste avec l’opacité sur les sommes récupérées et sur l’utilisation qui en est faite. En interne, la lutte anticorruption est perçue par de nombreux observateurs comme sélective et instrumentalisée, ciblant certains anciens responsables et oligarques tout en ménageant des réseaux toujours influents.

Les dispositifs mis en place — comités d’experts, délégations rogatoires, coordination avec les ambassades — peinent à convaincre d’une volonté réelle de rompre avec les pratiques du passé. L’absence de réformes structurelles pour garantir l’indépendance de la justice et protéger les lanceurs d’alerte entretient le scepticisme. La corruption systémique, alimentée par la rente pétrolière et l’opacité des marchés publics, reste un problème endémique que les campagnes internationales ne suffisent pas à résorber.

En multipliant les tribunes onusiennes et les engagements symboliques, l’Algérie cherche avant tout à redorer son image à l’étranger. Mais sans transparence sur les fonds effectivement récupérés ni réforme profonde des institutions nationales, la lutte anticorruption risque de rester davantage un exercice de communication qu’un instrument de transformation économique et politique.

SOURCE:APANews/APA-Alger (Algérie)

Comments (0)
Add Comment