Abdoulaye Maïga à Conakry pour une visite axée sur la coopération

Le Premier ministre malien Abdoulaye Maïga est arrivé mardi 9 décembre à Conakry pour une visite d’amitié et de travail centrée sur la coopération économique.

Lee déplacement du chef du gouvernement malien en Guinée intervient alors que la Guinée, qui avait maintenu ses frontières ouvertes au Mali lors des sanctions de la Cédéao, est devenue un corridor stratégique pour les échanges et certains approvisionnements du pays sahélien.

Le Premier ministre, ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, le général de division Abdoulaye Maïga, est arrivé à 8 h 30 à l’aéroport international Ahmed-Sékou-Touré de Conakry, pour une visite d’amitié et de travail en Guinée. À sa descente d’avion, il a été accueilli par son homologue guinéen, Amadou Oury Bah, ainsi que par des représentants des autorités et de la communauté malienne établie dans le pays.

Le chef du gouvernement malien conduit une délégation de haut niveau comprenant le ministre de la Défense et des Anciens combattants, le général de corps d’armée Sadio Camara, le ministre de l’Économie et des Finances Alousséni Sanou, la ministre des Transports et des Infrastructures Dembele Madina Sissoko et le ministre de l’Élevage et de la Pêche Youba Ba. Selon la primature malienne, la coopération économique est au centre de cette mission, qui prévoit des entretiens avec le Premier ministre guinéen avant une audience avec le président de la Transition, le colonel Mamadi Doumbouya.

Cette visite s’inscrit dans une relation bilatérale marquée par la position singulière de Conakry lors des sanctions de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) contre le Mali en janvier 2022. Au lendemain de la décision de la Cédéao de fermer les frontières avec Bamako et d’imposer un embargo commercial, les autorités de transition guinéennes avaient officiellement annoncé qu’elles ne s’associeraient pas à ces mesures et que les frontières aériennes, terrestres et maritimes de la Guinée resteraient ouvertes au Mali.

Depuis, le corridor Conakry–Bamako occupe une place croissante dans les échanges entre les deux pays. Les autorités douanières maliennes ont indiqué en 2022 que la Guinée et le Mali avaient décidé de faire de ce corridor un point majeur de desserte du Mali, avec une représentation permanente des douanes maliennes au port autonome de Conakry. Des analyses économiques publiées en 2025 décrivent le port de Conakry comme un « port naturel pour le fret malien », avec une progression des importations de marchandises à destination du Mali entre 2023 et 2024.

Le port guinéen joue également un rôle croissant dans l’acheminement de matériels sensibles vers le Mali. En janvier 2025, un convoi de véhicules militaires russes – chars légers, blindés de combat et véhicules de transport de troupes – destinés au Mali a été débarqué au port de Conakry avant de rejoindre la frontière malienne par route, selon des informations documentées par le quotidien français Le Monde. Le 2 août 2025, Bamako a en outre réceptionné un nouveau lot d’équipements militaires « en provenance du port de Conakry », a rapporté le site Journal du Mali, dans le cadre de la politique de rééquipement des forces armées maliennes.

Sur le plan frontalier, la coopération s’est structurée autour d’accords spécifiques. En août 2025, les deux pays ont conclu à Conakry un accord visant à lever les obstacles à la libre circulation des personnes et des biens, à mieux encadrer la transhumance et à lutter contre la criminalité transnationale sur plus de 800 kilomètres de frontière commune. L’accord prévoit notamment des contrôles conjoints, l’interconnexion des systèmes douaniers et des mécanismes bilatéraux de règlement des différends communautaires, en s’inscrivant dans la continuité d’un cadre bilatéral adopté en 2022.

En amont de ces ajustements, la question pastorale avait déjà provoqué des tensions entre les deux pays. Le 28 mars 2025, le gouverneur de la région de Kankan avait ordonné la suspension de la transhumance en provenance du Mali et fixé au 15 avril 2025 la date limite de départ des troupeaux maliens, en se référant aux règles de la Cédéao sur la circulation du bétail. Un délai supplémentaire avait ensuite été accordé jusqu’au 2 mai 2025 pour permettre la sortie des animaux déjà présents en territoire guinéen, avant l’entrée en vigueur d’une interdiction plus stricte de la transhumance malienne. Ce dossier, aux conséquences directes pour les éleveurs maliens, figure désormais parmi les enjeux structurants du dialogue bilatéral.

Le déplacement d’Abdoulaye Maïga intervient aussi dans un contexte régional profondément reconfiguré depuis le renversement du président nigérien Mohamed Bazoum en juillet 2023. Le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont signé le 16 septembre 2023 la Charte du Liptako-Gourma instituant l’Alliance des États du Sahel (AES) comme pacte de défense mutuelle, avant de transformer cette alliance en confédération lors d’un sommet tenu à Niamey le 6 juillet 2024. Les trois pays ont depuis quitté la Cédéao, et travaillent à la mise en place d’une force conjointe de 5 000 soldats, appuyée par des partenaires comme la Russie, selon plusieurs déclarations officielles et dépêches internationales.

La Guinée n’est pas membre de l’AES mais a à plusieurs reprises affiché sa solidarité avec le Mali, notamment en maintenant ses frontières ouvertes lors des sanctions régionales et en développant le transit de marchandises et de passagers entre Conakry, Kankan, Siguiri et Bamako. La visite du Premier ministre malien et des ministres clés des secteurs de la Défense, des Finances, des Transports et de l’Elevage s’insère dans cette dynamique, en mettant l’accent sur les aspects économiques et logistiques d’une coopération qui s’appuie sur le port de Conakry, les corridors routiers et les dispositifs de gestion des frontières convenus ces dernières années.

SOURCE : APA News/MD/Sf

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