En plaidant pour la libération des avoirs libyens gelés, Alger cherche à renforcer son influence régionale sous couvert de solidarité africaine, tout en occultant son propre rôle dans la paralysie du dossier libyen.
Réuni à New York, le groupe des A3+, composé de l’Algérie, de la Somalie, de la Sierra Léone et de la Guyana, a appelé le Conseil de sécurité à lever le gel sur les actifs financiers libyens. Au nom du groupe, Amar Bendjama, représentant permanent de l’Algérie auprès des Nations Unies, a exhorté les institutions financières internationales à appliquer sans délai la résolution 2769, autorisant l’Autorité libyenne d’investissement à réinvestir ses réserves de trésorerie. Une posture affichée comme un acte de justice économique, mais qui masque difficilement une tentative d’Alger de repositionner son influence dans un dossier dont elle fut longtemps un acteur ambigu.
Derrière les appels à la souveraineté et à la stabilité libyenne, le discours algérien s’inscrit dans une logique de réhabilitation internationale. Depuis son élection au Conseil de sécurité, Alger tente de se présenter comme un médiateur africain et un défenseur du multilatéralisme. En réalité, sa diplomatie demeure tiraillée entre le souci de préserver ses intérêts sécuritaires au Sahel et sa volonté d’affaiblir la présence d’autres puissances dans le dossier libyen, notamment le Maroc, la Turquie et l’Égypte, dont les initiatives ont souvent éclipsé celles d’Alger.
L’appel à libérer les fonds gelés, estimés à plus de 60 milliards de dollars, intervient alors que la Libye reste sans budget unifié ni mécanisme de contrôle, une situation que le diplomate algérien lui-même a déplorée. En revendiquant ce dégel immédiat, Alger semble davantage chercher à apparaître comme la voix des Africains au Conseil de sécurité qu’à garantir une gestion responsable de ces avoirs.
Les A3+, par la voix d’Amar Bendjama, ont réclamé le retrait « immédiat de toutes les forces étrangères et mercenaires », dénonçant les violations répétées de l’embargo sur les armes. Mais la position algérienne reste sélective : si elle fustige les interventions étrangères, elle évite soigneusement de condamner l’ingérence russe à travers le groupe Wagner, présent à quelques kilomètres de ses frontières, ni de s’interroger sur le rôle de certains réseaux pro-Algérie actifs dans l’Ouest libyen.
Cette prudence calculée illustre une diplomatie du double langage : d’un côté, un discours officiel de neutralité et de respect de la souveraineté libyenne ; de l’autre, un soutien implicite à des factions proches du pouvoir d’Alger, notamment au sein de Misrata et du Fezzan, où les intérêts sécuritaires et énergétiques algériens sont en jeu.
SOURCE : APA News /MK/ac/Sf/Alger (Algérie)