Algérie : chute de Nasser El-Djinn; la purge continue

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L’ancien chef de la sécurité intérieure, Nasser El-Djinn, vient d’être incarcéré, rejoignant une longue liste de patrons déchus des services de renseignement algériens. Une nouvelle illustration de l’instabilité chronique qui mine l’appareil sécuritaire du régime depuis le début du second mandat de Tebboune.

Le général Abdelkader Haddad, plus connu sous le pseudonyme de Nasser El-Djinn, a été placé sous mandat de dépôt, quelques semaines seulement après son limogeage le 22 mai dernier. Son arrestation intervient dans un climat de défiance généralisée au sein des cercles militaires, où la promotion semble désormais être le chemin le plus direct vers la prison. Avec lui, ce sont désormais cinq anciens chefs des renseignements algériens qui se retrouvent derrière les barreaux.

Cette nouvelle arrestation fait suite à une longue série de limogeages et d’incarcérations d’officiers supérieurs. Les généraux Wassini Bouazza (DGSI), Mohamed Bouzit alias Youcef (DDSE), Benmiloud Othmane dit Kamel Kaniche (DCSA) et le colonel Nabil Boubekeur dit Bob (DCSA) avaient déjà été lourdement condamnés ces dernières années. Certains purgent des peines allant jusqu’à vingt ans de prison.

Le parcours de Nasser El-Djinn illustre à lui seul la brutalité des luttes de pouvoir au sommet de l’État algérien. Réhabilité en 2021 et placé à la tête du tristement célèbre Centre principal d’investigations militaires de Ben Aknoun – symbole de la torture pendant la décennie noire – il avait été propulsé ensuite à la direction de la DGSI, malgré un passé marqué par des exécutions extrajudiciaires et des pratiques répressives extrêmes. Sa disgrâce brutale semble aujourd’hui sceller une nouvelle phase d’épuration sécuritaire.

Les services algériens traversent une instabilité sans précédent. À la Direction centrale de la sécurité de l’armée (DCSA), pas moins de six changements de direction ont été enregistrés entre 2019 et 2023. La Direction de la documentation et de la sécurité extérieure (DDSE) a vu défiler six chefs depuis l’arrivée au pouvoir du duo Tebboune–Chengriha. Cette valse effrénée des généraux, souvent suivie d’arrestations, mine la cohérence stratégique de l’appareil de renseignement et fait planer un climat de terreur sur ses actuels dirigeants.

L’usure du régime est palpable. Des figures historiquement proches de Gaïd Salah ont été éliminées de la hiérarchie militaire après sa mort, pour faire place aux hommes de Toufik – eux-mêmes aujourd’hui à nouveau évincés ou arrêtés. Même les fidèles du général Chengriha, tels que Sid-Ali ould Zemirli ou Noureddine Makri, n’échappent plus aux purges.

En toile de fond, le désordre structurel des services algériens reflète une incapacité chronique à stabiliser les pôles du pouvoir sécuritaire. Le recours à des figures de l’ancien DRS, puis leur éviction progressive, démontre que ni loyauté, ni continuité ne fondent la hiérarchie militaire actuelle. Le système fonctionne sur l’opacité, la suspicion permanente et la brutalité des ruptures.

Cette instabilité rampante ne laisse pas présager une issue politique pacifiée. Le second mandat d’Abdelmadjid Tebboune, amorcé dans la méfiance et les règlements de compte, semble d’ores et déjà compromis. À mesure que l’armée devient le théâtre de luttes intestines sans fin, l’hypothèse d’une transition autoritaire non maîtrisée devient de plus en plus plausible.

SOURCE:APANews/APA-Alger (Algérie)

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