Tchad: mandat présidentiel et réformes institutionnelles en débat

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Le Tchad amorce la révision de sa Constitution avec le vote de principe sur l’allongement du mandat présidentiel et d’autres ajustements institutionnels, ouvrant la voie à un débat législatif décisif.

La séance plénière tenue ce lundi à l’Assemblée nationale tchadienne a marqué une première avancée dans le processus de révision de la Constitution du 29 décembre 2023. Les députés se sont prononcés en faveur de la prise en considération d’une proposition de loi constitutionnelle qui vise à introduire plusieurs ajustements institutionnels et politiques. Si ce vote ne modifie pas encore la Loi fondamentale, il ouvre néanmoins la voie à un débat plus substantiel qui se tiendra dans les semaines à venir.

Au cœur de la proposition figure l’allongement du mandat présidentiel, qui passerait de cinq à sept ans. Ce choix, justifié par ses promoteurs comme une manière de renforcer la stabilité institutionnelle, suscite néanmoins un questionnement sur l’équilibre entre efficacité gouvernementale et nécessité de limiter la concentration du pouvoir. Dans le même esprit, la création d’un poste de Vice-Premier ministre et l’harmonisation de la durée des mandats des députés, sénateurs et élus locaux à six ans apparaissent comme une volonté de consolider la cohérence du système politique.

La réforme ne se limite pas aux structures électives. Elle touche également au fonctionnement de la vie politique, avec l’introduction d’un financement public des campagnes électorales. Ce dispositif, souvent perçu comme un moyen de réduire l’influence des financements privés et de favoriser une compétition plus équitable, soulève toutefois la question des modalités de répartition et des garanties de transparence. De même, le changement de dénomination du « Médiateur de la République » en « Médiature de la République » peut sembler symbolique, mais reflète une recherche de modernisation institutionnelle.

Un autre point notable réside dans la responsabilisation accrue des membres du gouvernement, désormais justiciables devant les juridictions de droit commun pour les crimes et délits économiques et financiers. Cette mesure, en apparence technique, s’inscrit dans un contexte où l’exigence de redevabilité des élites politiques se fait de plus en plus pressante.
Enfin, l’instauration d’une pause estivale pour le Président de la République et le Premier ministre illustre une tentative d’aligner la pratique institutionnelle sur les standards observés ailleurs, en ménageant un temps de respiration politique.

Cependant, l’adoption définitive de ces amendements reste conditionnée à un parcours législatif encore long. Après ce premier vote de principe, le Sénat devra à son tour se prononcer. Ce n’est qu’à l’issue de cette double validation que les deux chambres se réuniront en Congrès le 13 octobre prochain pour décider, à la majorité des trois cinquièmes, d’entériner ou non la révision. D’ici là, le 17 septembre marquera l’installation formelle du Congrès et la mise en place d’une commission spéciale chargée de rédiger son règlement intérieur.

L’essentiel du débat politique est donc encore à venir. Les semaines qui s’annoncent seront décisives, car elles permettront de mesurer non seulement la solidité du consensus autour de ces réformes, mais aussi la capacité des institutions tchadiennes à engager une révision constitutionnelle perçue comme technique, mais dont les implications pourraient profondément modifier l’architecture du pouvoir.

SOURCE:APANews/APA – N’Djamena (Tchad)

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