Paris soupçonne une «activité numérique malveillante» d’Alger
Alors que les relations entre la France et l’Algérie traversent une phase de fortes tensions, une note confidentielle de Viginum, révélée par Le Canard enchaîné, met en cause un réseau de désinformation numérique actif depuis l’Algérie et ciblant l’opinion publique française.
Le climat diplomatique déjà dégradé entre Paris et Alger s’alourdit d’une nouvelle alerte : selon une note confidentielle adressée à Matignon le 25 juin, et dont le contenu a été révélé par Le Canard enchaîné, les services français de lutte contre les ingérences numériques étrangères (Viginum) ont identifié une « activité numérique malveillante » émanant d’un « réseau de trolls localisés en Algérie » et « coordonnés » pour influencer l’espace public français.
Ce réseau aurait multiplié, depuis le début de l’année, les campagnes de désinformation sur les réseaux sociaux, à travers de faux comptes diffusant des récits clivants, des thèses complotistes ou des messages hostiles à certaines institutions françaises. Le rapport de Viginum évoque un pic d’activité observé autour du 5 juillet, jour de la fête nationale algérienne, durant lequel des publications virales ont accusé la mairie de Paris d’avoir « insulté la mémoire des Algériens » en organisant des festivités en Seine, en référence à la répression du 17 octobre 1961.
Ce regain de tensions s’inscrit dans une séquence diplomatique particulièrement tendue entre les deux pays. Depuis la reconnaissance officielle, en juillet 2024, par le président Emmanuel Macron, de la souveraineté du Maroc sur le Sahara, Alger a suspendu plusieurs mécanismes de coopération bilatérale. Le président Abdelmadjid Tebboune a refusé la réadmission de ressortissants algériens expulsés de France, et plusieurs figures intellectuelles ou politiques, critiques du régime, ont été incarcérées ces derniers mois, à l’instar de l’écrivain Boualem Sansal ou de l’opposant Amine Amir. Plus récemment, un journaliste français, Christophe Gilezes, a été condamné à sept ans de prison pour « apologie du terrorisme ».
Les autorités françaises n’ont pas encore officiellement commenté cette note de Viginum, mais plusieurs sources gouvernementales évoquent une préoccupation croissante quant à l’ampleur et à la structuration des ingérences numériques émanant de pays tiers, en particulier dans les contextes post-coloniaux sensibles. Ces actions s’inscrivent dans une logique d’influence informationnelle qui, selon les experts, pourrait viser à affaiblir la cohésion sociale, discréditer certaines institutions, voire polariser davantage les débats publics en France.
MK/ac/Sf/APA
Source: APANEWS