Affaire Woodside: le Sénégal va «défendre ses intérêts» (avocat)

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Le litige fiscal entre l’État du Sénégal et la compagnie pétrolière Woodside relance les appels à une réforme du droit des investissements, pour mieux défendre les intérêts nationaux face aux multinationales.

Le différend opposant l’État du Sénégal à la compagnie pétrolière australienne Woodside Energy, désormais porté devant le CIRDI, ravive les débats sur l’équilibre à trouver entre attractivité pour les investisseurs étrangers et défense des intérêts économiques nationaux. Il a été évoqué jeudi 19 juin à Dakar lors de la première édition des Rencontres africaines du droit international (RADI), centrée sur la souveraineté économique et le droit international de l’investissement.

Au cœur du contentieux : un redressement fiscal de 41 milliards de francs CFA (62,5 millions d’euros) réclamé depuis près de deux ans par l’administration fiscale sénégalaise au groupe Woodside, principal exploitant du champ pétrolier de Sangomar, situé au large de Dakar. Contestant toute dette fiscale, le géant australien a saisi le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI), basé à Washington, ouvrant ainsi la voie à un arbitrage international qui inquiète les milieux d’affaires dakarois.

« Il y a effectivement un différend (…) selon lequel Woodside aurait reçu du Sénégal des injonctions de payer des impôts que l’entreprise réfute », a indiqué Me Aboubacar Fall, avocat, président de la Société sénégalaise de droit international (SSDI) et directeur des programmes de l’African Center of International Law Practice (ACILP). S’il dit ne pas connaître les détails du dossier, Me Fall voit dans cette affaire l’illustration des déséquilibres que les États africains subissent dans leurs relations avec certains investisseurs.

Ces préoccupations ont été au centre des discussions lors des RADI, tenues jeudi à la Chambre de commerce de Dakar, où juristes, experts et responsables institutionnels ont plaidé pour une refonte du droit international de l’investissement. Dr Mouhamadou Madana Kane, président de l’ACILP, a ainsi dénoncé les clauses restrictives de certains traités bilatéraux d’investissement (TBI) signés par le Sénégal, qui limiteraient ses capacités de régulation, notamment en matière de contenu local dans les secteurs stratégiques comme les hydrocarbures.

Selon Suzy Nikiema, directrice de l’Institut du droit des investissements à Genève, le régime actuel des TBI « a surtout engendré des contentieux coûteux et dissuadé les États de mener des politiques publiques légitimes », appelant à une révision en profondeur du système.

Pour Me Aboubacar Fall, l’objectif des réformes en cours est clair : « Que ce type de problème n’arrive plus. Que l’État soit en mesure de gérer ses rapports avec les investisseurs de manière équilibrée, tout en préservant les intérêts des populations, en matière de santé, d’éducation ou d’environnement ».

Représentant la présidence de la République, la conseillère spéciale Marième Touré Lô a rappelé que le Sénégal entend concilier « ouverture économique » et « capacité à conduire ses politiques selon ses propres intérêts », à travers notamment la révision du Code des investissements et la réforme de la justice économique.

ODL/ac/Sf/APA

SOURCE: APANews/ APA-Dakar (Sénégal)

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