Près d’un an après les assises de la justice, le Sénégal lance à partir du mercredi 28 mai à Diamniadio, près de Dakar, des concertations nationales d’une semaine pour consolider les fondements de sa démocratie, dans un contexte marqué par des mutations politiques et attentes croissantes en matière de gouvernance.
Pays souvent cité comme modèle démocratique en Afrique, le Sénégal a connu trois alternances pacifiques au sommet de l’Etat (en 2000, 2012 et 2024), ainsi que des changements réguliers à l’échelle nationale et locale. Cependant, les autorités relancent le dialogue, reconnaissant la nécessité de repenser régulièrement l’architecture institutionnelle afin de l’adapter aux dynamiques politiques contemporaines et aux défis observés lors des précédentes échéances électorales.
A deux jours de l’ouverture du dialogue national du 28 mai, Dr Cheikh Guèye, facilitateur général de cette rencontre, a évoqué dans Le Soleil la volonté d’instaurer un cadre politique réformé, notant que « tout est mis en œuvre pour que ce dialogue soit inclusif, méthodique et orienté vers des résultats concrets ».
Ce membre de la société civile, chargé de superviser les travaux, a récemment vu sa neutralité contestée par l’Alliance pour la République (APR), le parti de l’ancien président Macky Sall, qui a appelé au boycott.
Outre l’APR, certaines figures de l’opposition comme les députés Thierno Alassane Sall et Pape Djibril Fall ont décliné la main tendue du chef de l’Etat, dénonçant « un manque de transparence et d’inclusivité » du processus.
Toutefois, les appels au boycott semblent s’essouffler, selon EnQuête, soulignant que l’ancien maire de Dakar, Khalifa Sall, et son mouvement Taxawu ont confirmé leur participation, tandis que le Parti socialiste « affûte ses idées » pour mieux prendre part à la rencontre.
Ce dialogue « en temps de paix », convoqué par le président Bassirou Diomaye Faye, s’inscrit dans la tradition sénégalaise de concertation instaurée depuis l’adoption du Code électoral consensuel de 1992. Il s’appuie sur la conviction que la stabilité démocratique repose sur un cadre institutionnel inclusif, équitable et résilient.
Cohésion
« Nous matérialisons notre engagement à garantir une cohésion nationale toujours renforcée », déclarait le cinquième chef de l’Etat sénégalais, le 3 avril dernier, lors d’une adresse à la nation à la veille de la célébration du 65e anniversaire de l’indépendance du pays. « La solidité d’une nation se mesure aussi par sa capacité à dialoguer », ajoutait-il.
Ainsi, trois axes structurent les discussions qui se dérouleront du 28 mai au 4 juin : la démocratie et les libertés fondamentales, le processus électoral et les réformes institutionnelles. Les participants s’attacheront notamment à examiner la réforme du système électoral, le remplacement possible de la Commission électorale nationale autonome (CENA) par une Commission électorale nationale indépendante (CENI), la question du parrainage, l’inscription automatique sur les listes électorales via la carte nationale biométrique Cédéao, ainsi que le vote des détenus.
Des débats sont également prévus sur la rationalisation du calendrier républicain, l’encadrement du financement et du fonctionnement des partis politiques, le statut de l’opposition et de son chef, ou encore la place de la justice dans le processus électoral.
Le dialogue réunit autour d’un Cadre de concertation sur le processus électoral (CCPE) des représentants de la majorité, de l’opposition, de la société civile, ainsi que des institutions comme le Conseil constitutionnel, la CENA, le CNRA et plusieurs ministères concernés. Un comité de pilotage est chargé de coordonner les travaux, faciliter les médiations et rédiger un rapport final.
Les résultats attendus porteront sur des recommandations consensuelles visant à renforcer le système démocratique sénégalais, clarifier les règles électorales, rationaliser le fonctionnement des partis et mieux encadrer le processus électoral en vue des prochaines échéances : les élections territoriales de 2027, la présidentielle et les législatives de 2029.
ODL/ac/Sf/APA
Source: APANEWS