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En recevant son homologue botswanais, le ministre algérien des Affaires étrangères veut se montrer active, connectée, influente. Mais la diplomatie algérienne fait face à une équation complexe : elle convainc peu.

À Alger, les gestes diplomatiques se succèdent avec une régularité presque mécanique, comme pour masquer une influence continentale en perte de vitesse. Mardi, Ahmed Attaf, ministre d’État en charge des Affaires étrangères, recevait son homologue botswanais, Phenyo Butale, en marge du 12ᵉ Séminaire de haut niveau sur la paix et la sécurité en Afrique, le fameux « Processus d’Oran ». Mais derrière cette réunion présentée comme un moment de « coopération fraternelle », se cache une diplomatie algérienne fragilisée, contestée et parfois accusée d’ingérence, notamment au Sahel.

Le communiqué officiel évoque une revue des relations bilatérales et la volonté d’établir des cadres juridiques nouveaux. Un langage standardisé, qui peine à dissimuler les difficultés stratégiques d’Alger sur la scène africaine. Le Processus d’Oran, censé être un espace d’échanges pour la paix et la sécurité, apparaît de plus en plus comme un outil de communication interne plutôt qu’un véritable mécanisme d’influence. Et pour cause : dans le Sahel, l’Algérie fait l’objet d’accusations répétées d’ingérence, tandis que plusieurs États — Mali, Niger, Burkina Faso — ont largement réévalué leurs partenariats sécuritaires en se détournant de son rôle de médiateur.

Dans ce contexte, la multiplication des entretiens bilatéraux ressemble moins à un regain d’influence qu’à une course à la légitimité.

La rencontre avec le Botswana se veut symbolique : mettre en scène une diplomatie tournée vers l’Afrique australe, région où Alger n’a jamais réussi à établir de véritables points d’ancrage. Le gouvernement algérien tente d’y vendre l’image d’une puissance africaine incontournable, alors même que l’essentiel de ses efforts diplomatiques se concentre sur ses rivalités régionales, du Maroc au Mali.

Le Botswana, pays stable et démocratique, se distingue par une diplomatie mesurée, fondée sur des relations équilibrées. Le contraste avec l’approche souvent intrusive d’Alger est saisissant. Ce « rapprochement » soudain a ainsi tout d’une tentative d’élargir artificiellement le réseau de soutiens africains, alors que plusieurs partenaires historiques de l’Algérie prennent leurs distances.

Dans le communiqué du ministère algérien, les deux parties conviennent de « mettre en place des cadres juridiques et des structures institutionnelles »  pour renforcer la coopération.
La formule, répétée d’un communiqué à l’autre, révèle surtout l’absence de relations solides préexistantes. L’Algérie, dont la diplomatie se veut omniprésente, peine pourtant à établir des partenariats concrets hors de sa zone sahélienne d’influence traditionnelle.

Cette rhétorique du « renforcement futur » est devenue un marqueur d’une diplomatie qui survit davantage sur le symbolique que sur l’opérationnel. Si la coopération était réellement dense, ces cadres juridiques existeraient déjà.

Alors que les ministres se succèdent sur la photo officielle, une question persiste : de quelle paix et de quelle sécurité parle-t-on réellement à Oran ? Dans le Sahel, les transitions politiques successives, la montée des alliances régionales alternatives et la remise en cause de l’accord d’Alger de 2015 ont affaibli le rôle traditionnel de médiateur revendiqué par l’Algérie. Le Processus d’Oran, présenté comme un think-tank continental, semble désormais déconnecté des réalités géopolitiques du continent, réduisant l’événement à une vitrine diplomatique.

Dans ce décor, la rencontre avec le ministre botswanais apparaît moins comme une avancée stratégique que comme un exercice de communication destiné à donner l’image d’une Algérie au centre du jeu africain, alors qu’elle en est de plus en plus en périphérie.

SOURCE : APA News/MK/Sf/Sf/-Alger (Algérie)

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